Kermesz à l'Est en concert pour... vaches !
- Yannick Hustache (PointCulture) : une question un peu « bateau » pour commencer : comment survit-on en tant que groupe durant un an sans concert et sans se prendre la tête ?
- KermesZ à l’Est : 2020, paradoxalement, a été une année très fertile pour nous. Une tournée en Australie et Nouvelle-Zélande en mars, puis la sortie de notre dernier disque RDS-202 en avril, un financement participatif en mai…
Et puis, pour faire face aux annulations de l'été, on a monté un plan B : la KermosZyclette, une tournée wallonne en vélo qui a très bien fonctionné (35 dates et 500 kilomètres parcourus). — KermesZ à l’Est
Cet hiver, on a surtout mis le focus sur la mise en place d'un nouveau répertoire : composition, arrangement, mise en scène. Mais aussi la rénovation de nos outils internes de fonctionnement, liés par exemple au booking, à l'administration, à la com. On a aussi produit de la vidéo, tel ce bilan de 2020 :
On prépare aussi un nouveau clip pour le printemps.
Ce qu’il importe de rappeler, c'est que les prestations, pour le musicien, c'est la partie visible de l'iceberg. Si celles-ci n'ont pas eu lieu, les activités non visibles pour le public ont, quant à elles, continué. En tant que groupe cogéré, on est resté en lien, solidairement, positivement, et on a continué à bosser. — KermesZ à l'Est
On a encore des tonnes d'idées et de pistes de travail. Mais KermesZ est avant tout un groupe de scène, on a évidemment besoin de prestations et de contact avec le public pour donner sens à notre activité. On ne rentre pas dans le jeu des live-video, ça n'a aucun intérêt pour nous. Comme on est tout-terrain, on tente plutôt d'exercer notre créativité pour mettre les concerts là ou ça reste possible.
Terminons la question bateau par une réponse bateau : cet été, on prépare – entre autres – une tournée en péniche.
- Qu'est-ce qui vous a poussés à vous joindre à l’initiative Still Standing For Culture ? Il me semble que vous êtes pratiquement les seuls musiciens à y être?
L'appel du 20 février tombe dans un moment de solitude absolu pour nous, en tant que musiciens. Aucune perspective en vue. C'est navrant, et ça nous démange de passer à l'action, de faire entendre notre réalité. Nous avons autant besoin du public que l'inverse. Comment agir sans rentrer en conflit avec les règles ou les ‘flippés du corona’ ? — KermesZ à l'Est
On a donc prospecté d'autres lieux et on a choisi un élevage avec qui on entretient une relation de sympathie mutuelle. C'est un élevage de vaches laitières, plus habituées à l'homme que les viandeuses (vu qu'elles sont traites deux fois par jour), d'une race amitieuse et curieuse, pas agressive, ce qui nous permet de jouer à l'intérieur de la stabulation. La vache est un animal sensible, réactif, et autant l'éleveur que nous avons envie de tenter l'expérience pour observer leur réaction. — KermesZ à l'Est
- L'idée de ce concert bestial a germé et tout le groupe a été enthousiaste, les partenaires aussi, on a pu la réaliser rapidement. L'action Still Standing a fait office d'horizon pour réaliser cette action symbolique.
- Votre concert sera en formule minimale ou avec tout le groupe ? Pourquoi jouer devant des vaches et pas des moutons, poules, porcs, chats ?
- Le concert se fait sans notre caisse-clairiste adoré qui est coincé en Argentine. Mais tout de même à sept dans une stabulation libre. On a d'abord prospecté un gros poulailler mais la crise du covid éclipse une autre crise sanitaire dans le monde agricole, celle de la grippe aviaire, qui impose des restrictions très fortes dans l'élevage de poulets.
On dit que les vaches aiment la musique, que leur diffuser Mozart augmente la qualité et la quantité de lait produite.
Les moutons sont plus peureux et surement moins réactifs ; les porcs sont sujets au stress ; les chats sont difficiles à rassembler.
Faute de pouvoir jouer pour des humains, ce sera donc des vaches qui profiteront de notre musique.
Interview : Yannick Hustache, février 2021