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Bulletin de santé : l'artiste au cinéma en 2014-2015

Artistes au travail

publié le par Catherine De Poortere

Quelle vision le cinéma récent nous donne-t-il de l'artiste au travail ?

Le cinéma n’a jamais fini de s’intéresser à cet autre de lui-même qu’est l’artiste. Sujet récurrent fait d’apparitions marquantes, il n’échappe pas dans son traitement aux modes et aux points de vue en vigueur lors de sa réalisation pas plus qu’il ne s’exonère des débats qui agitent ses contemporains. Sans doute ces variations autour d’un personnage fortement caractérisé renvoient-elles aussi à l’idée que l’artiste, un peu plus que n’importe quel autre personnage, agit sur son époque comme un révélateur, qualité qui lui vaut de cristalliser, non pas seulement ce qui se rapporte à sa pratique ou à l’art en général, mais quelque chose d’une sensibilité qui pense et fait penser. L’actualité récente offre donc une intéressante diversité de figures créées de toute pièce ou inspirées de personnes réelles. Petit tour d’horizon de ce qu’on a pu voir en salle dans le courant de l’année 2014 jusqu’en en ce début 2015 :

 

Jersey boys, Clint EASTWOOD

Le New Jersey dans les années 1960, quatre garçons échappent à la délinquance en se lançant dans la chanson : l’histoire vraie des Four seasons, groupe qui a laissé derrière lui quelques tubes mémorables dont « Can’t take my eyes off of you ».

Maestro, Lea FAZER

Projet initialement conduit par l’acteur Jocelyn Quivrin quelque temps avant sa mort. Le scénario, repris et complété par Lea Fazer, décrit la rencontre entre un acteur inculte et un réalisateur aguerri, double d'Eric Rohmer. Le film met en scène Michael Lonsdale et Pio Marmaï respectivement dans les rôles du vieux sage et du jeune premier.

Maps to the stars, David CRONENBERG

Poussant la caricature jusqu’à la limite du rire et de l’horreur, Cronenberg filme Hollywood comme s’il s’agissait d’un cercle de l’enfer : hystérie, débordements de chair, morts violentes et rédemption céleste. En prime, le poème "Liberté" d'Éluard récité en boucle.

Le Beau monde, Julie LOPES-CURVAL

Fracture sociale sur fond d’éducation amoureuse et artistique. Quoi qu'on en pense, le cheminement s’avère tout aussi difficile pour la modeste brodeuse que pour l’enfant riche qui ambitionne une carrière de photographe. À chacun de combattre ses inhibitions et ses préjugés de classe.

Saint Laurent, Bertrand BONELLO

Un biopic prenant le parti de déconstruire son personnage et de le difracter sur le visuel de son époque.

Sils Maria, Olivier ASSAYAS

Mise en abîme du temps qui passe par le biais du travail de l’acteur. Ici une star vieillissante (Juliette Binoche) s’apprête à rejouer dans la pièce qui l’a rendue célèbre au début de sa carrière.

L'Institutrice, Nadav LAPID

Réflexion sur la place du poète dans la société passant par le prisme d'un petit garçon doué d'un talent prodigieux que son institutrice tente à tout prix de soustraire à l'intérêt, à l'hostilité et pire encore, à l'indifférence.

Le Scandale Paradjanov, Serge AVEDIKIAN et Olena FETISOVA

Hommage à Sergeï Paradjanov, réalisateur soviétique dissident, auteur des Chevaux de feu.

Mr Turner, Mike LEIGH

Biographie filmée du peintre anglais précurseur de l’impressionnisme.

Eden, Mia HANSEN-LØVE


 

La réalisatrice s’inspire de son frère, Sven, pour un film qui retrace l’itinéraire d’une figure majeure de la French touch, musique électro-garage en vogue dans les années 1990. Amour, drogue et débâcle financière dessinent un drame classique en deux actes conjuguant gloire et oubli.

Whiplash, Damien CHAZELLE

Faut-il souffrir pour atteindre l’excellence en art ? Un jeune homme donne du crédit à cette thèse en se prêtant aux exigences démesurées d’un professeur aussi performant qu’irascible au sein d’une prestigieuse école de jazz new-yorkaise.

Pasolini, Abel FERRARA


 

Concentrer toute une vie en un seul jour ? Ferrara relève le pari woolfien en évoquant les dernières heures du poète et cinéaste italien mort assassiné en 1975.

Amour fou, Jessica HAUSNER

Voulez-vous mourir avec moi ? En 1810, Heinrich Von Kleist n’a pas encore trente-cinq que déjà, miné par la dépression, il songe à se suicider. Pour en finir, il n’attend plus que l’amoureuse qui consentirait à accompagner dans la mort… Malgré l’évidente  gravité du propos, le film adopte un ton mordant et n’hésite pas à prendre ses libertés avec les faits historiques.

Listen up Philip, Alex Ross PERRY


Toujours aussi adorablement insupportable, écran de tous les reproches, l’écrivain new-yorkais n’a pas dit son dernier mot. De ce personnage devenu le type même de l’intellectuel acrimonieux et charmant de maladresse, on ne se lasse pas de rire et c’est ici un représentant de la nouvelle garde du cinéma indépendant américain qui en fait la démonstration pour une comédie qui ne boude pas l’héritage d’un Woody Allen.  

Frank, Lenny ABRAHAMSON


Les aventures d’un groupe de musique pop en pleine ascension vers la gloire. Tandis que le narrateur, témoin transparent prend les traits d’une jeune recrue au regard émerveillé, Frank, le leader,  dissimule son visage sous un masque de papier mâché.

Réalité, Quentin DUPIEUX


Dans cette comédie plutôt loufoque, Alain Chabat tient le rôle d'un cinéaste malchanceux bien déterminé à  réaliser un film d'horreur.

Birdman, Alejandro INARRITU

Cette adaptation d’une nouvelle de Raymond Carver retrace le come-back à Broadway d’un acteur déchu célèbre en son temps pour avoir incarné un super-héros. Grand gagnant des oscars 2015.

Big eyes, Tim BURTON

Biographie d’une imposture : à la fin des années 1960, un homme connaît une relative célébrité grâce à la peinture. Ses œuvres, dont la singularité est de représenter des femmes dotées d’immenses yeux, sont en réalité le travail de son épouse.

Un sort pour éloigner les ténèbres, Ben RIVERS & Ben RUSSEL


Ce film  relate, entre documentaire et fiction, l'odyssée d'un homme de l'Estonie à la Norvège. Le périple s'achève dans un paroxysme lorsque l'errant devient le chanteur d'un groupe de black-metal.

Anton Tchekhov 1890, René FERET


Mes personnages sont dans l'ennui de leur vie et dans la consience de leur échec. Et tout à coup, un coup de feu dans la gueule du spectateur. Portrait du célèbre dramaturge russe resserré sur l'année 1890, date à laquelle il se rend sur l'île de Sakhaline, île de bagnards, pour surmonter le deuil de son frère.

 

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