Lâmekân Ensemble et Derya Türkan au Théâtre Molière
Orient et Occident se croisent pour tisser les liens musicaux issus de la musique classique ottomane, rythmés selon une tradition ancestrale qui remonte au XVe siècle et progresse dans le temps jusqu’à la musique de cour ottomane du XIXe. C’est sous l’égide du joueur de oud et musicologue Tristan Driessens que ce voyage initiatique débute, animé par le plaisir du partage immédiat et quasi instinctif de musiciens généreux et passionnés. Dans le monde classique, il est souvent question d’assise musicale pour permettre d’organiser des mélodies mais ici, chaque musicien communique dans l’instant l’essence même d’une âme collective que chaque intervention renforce avec une énergie décuplée. Plaisir instinctif et joie de la transmission immédiate rythment les solos de musiciens dévoués et concentrés dont on perçoit très nettement les retrouvailles humaines et musicales. Invité spécial, Derya Türkan et son kemençe rejoint en seconde partie l’ensemble Lâmekân pour engager d’autres voix musicales qu’il partage dans un élan de simplicité généreuse déconcertant. Qui mieux que lui aujourd’hui au kemençe parvient à souffler du son dans ses cordes ? On s’y tromperait lourdement rien qu’à l’écoute s’il ne faisait pas la démonstration devant nous, frottant à l’archet trois cordes qui vibrent et respirent. Régulier de l’ensemble, Ridvan Avdinli prend également une place particulière lors de ce concert, passant du chant au ney ; il servira d’axe central et de balancier entre les musiciens, proposant sans imposer des orientations qui seront ensuite reprises par l’ensemble des musiciens. Une présence indispensable tout comme celle du violoniste Ruben Tenenbaum que nous aurions aimé entendre davantage en solo, à l’image de l’incroyable performance de Simon Leleux (percussion) dont l’énergie mène à la transe d’une danse tribale sous le regard amusé de son collègue Robbe Kieckens. Un mot très particulier encore pour la harpe orientale de Muhittin Kemal, autre figure centrale de cet ensemble sans qui le rythme et l’harmonie ottomans n’auraient certainement pas la même pulsion organisationnelle de rassemblement. Bien sûr tout ceci ne serait pas possible sans l’égide du maître de cérémonie, Tristan Driessens dont le travail démontre ici tout l’intérêt de rencontres plurielles entre différentes cultures. Le pont entre ces cultures existe à n’en point douter et si vous souhaitez vous en convaincre sans avoir été au concert, le nouvel album de l’ensemble Lâmekân publié par Cypres est désormais disponible. Le programme complet du concert s’y trouve, et même plus !
Noël Godts
mai 2017
Book of Lovers sera disponible dans les PointCulture deux mois après sa sortie, soit vers la mi-juillet
D'ici-là, un autre concert du groupe (en trio cette fois):
Trio Lâmekân: The Book of Lovers
Le samedi 17 juin 2017 à 20h
Art Base
29 rue des sables
1000 Bruxelles