Compte Search Menu

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies permettant d’améliorer le contenu de notre site, la réalisation de statistiques de visites, le choix de vos préférences et/ou la gestion de votre compte utilisateur. En savoir plus

Accepter
Pointculture_cms | focus

Peter Watkins ou un certain cinéma du réel

La bombe, Peter Watkins, Punishment park, réel

publié le

Dissocier le vrai du faux dans l'oeuvre de Peter Watkins ? Un non-sens.

Sommaire

Admettre une contrefaçon c'est accepter une manipulation potentielle. Mais c'est oublier un peu vite ce qui peut se cacher derrière cette démarche perçue trop souvent comme uniquement trompeuse. Ainsi ce que l'on considère comme un vulgaire faux peut n’être qu'une réinterprétation d'une réalité donnée pour acquise. Dès lors, et c'est bien là toute la pertinence d'une telle démarche, cette vision neuve (fausse ?) d'un matériau préexistant agit comme un révélateur d'un pan de vérité initialement occulté.

bombeDans l'œuvre de Peter Watkins, essayer de dissocier le vrai du faux est en soi un non-sens. Non pas que la tâche soit en elle-même trop ardue pour en venir à bout, mais parce qu’elle ne relève que d’un intérêt secondaire. Tout au long de son œuvre, le cinéaste anglais s'est concentré à détourner sciemment la forme documentaire et son concept de « vérité absolue » qu'on lui adjoint souvent maladroitement. Car, si interrogation il doit y avoir sur l'œuvre du réalisateur, c'est sur la place moins évidente qu'occupent réalité et vérité dans ses films. Produit par la BBC en 1965, The War Game, sorte d’anticipation documentarisée sur les ravages dus à une attaque nucléaire à l’encontre de l’Angleterre, joue subtilement sur les rapports étroits et primordiaux entre ces deux concepts. Watkins croise habilement fiction et documentaire en reconstituant des scènes de panique plus vraies que nature et, à l'inverse, fictionnalise des propos pourtant bien réels tenus par des représentants politiques ou religieux d'alors. Cette démarche peu habituelle a deux raisons d'être : d'une part permettre au public de ne pas trop s'impliquer émotionnellement dans le film et d'autre part de le pousser à la réflexion sur la différence fondamentale entre le réel, le vraisemblable et la vérité. Plus qu'une réflexion sociopolitique sur son époque, The War Game va définir les bases du discours de Watkins sur les médias et la manipulation qu'ils peuvent exercer.

punishmentQuelques années plus tard, alors établi aux États-Unis, il réalise Punishment Park, sorte d'anticipation politique où les opposants au régime de Nixon sont jugés par un tribunal civil extraordinaire. Ici le contrepoint narratif est établi par un montage parallèle qui met en regard les scènes du tribunal avec celle du Punishment Park (la sentence alternative imaginée par le réalisateur). Cette nouvelle réalisation fictionnelle montrée à la façon d'un documentaire, bien que moins facilement identifiable comme fictive, porte un regard très critique sur les médias et sur le concept de téléréalité. Sous ses dehors manipulateurs, Watkins creuse le rapport du spectateur à l'image et la place de celui-ci dans le « spectacle audiovisuel ». Cette forme de perversion qu'il introduit volontairement dans son œuvre (ou plutôt qui la structure) n'a de cesse d'induire au questionnement et au débat public. Complexe et complète, l'approche filmique du cinéaste, que ce soit sur le fond ou sur la forme, ne fait que peu de concessions et se vit comme une expérience totale à la fois cinématographique et sociopolitique.

 


Classé dans