Revue du web BEST OF : films et vidéos en ligne, surprises et decouvertes
Sommaire
UniversCiné, UnCut - bientôt Sooner : la VOD cinéphile
Lancée il y a dix ans, l'antenne belge de la plateforme de cinéma d'auteurs en ligne UniversCiné France est sur le point de prendre son indépendance et de muter. Mais, en attendant la venue de Sooner, qui réunira en un seul endroit l'offre d'achat et de location de films, à l'unité ou par abonnement, le catalogue déjà conséquent de la plateforme s'est récemment vu augmenté de films belges qui auraient dû faire l'objet d'une diffusion en salles. Vitrine du cinéma indépendant en ligne, UniversCiné offre une belle diversité de contenus, mis en valeur par une interface à entrées multiples régulièrement mise à jour. Le choix des focus actuels, Lutte des classes, Du livre au film, LGBTQ+ et Cinéastes femmes démontre qu'il ne s'agit pas seulement de vendre du film au kilomètre, mais de raccorder l'histoire du cinéma à notre époque tout en la couvant d'un regard cinéphile. [CDP]
> UniversCiné
> UnCut
Le Cinéma belge à la maison
Le cinéma belge à la maison est une initiative du Centre du cinéma et de l'audiovisuel de la Fédération Wallonie-Bruxelles destinée à soutenir le secteur pendant la période de fermeture des salles. Pour chaque film initialement programmé, le site recense les plateformes offrant un accès (payant) à ces films. On retrouvera ainsi le très attendu Jumbo de Zoé Wittock, avec Noémie Merlant, découverte dans Le Portrait de la jeune fille en feu. De ce service ne sont pas non plus oubliés les courts métrages et documentaires dont la diffusion ne dépend généralement pas des cinémas. Mises à l’honneur, les plateformes Proximus, Voo, Auvio, UnCut et UniversCiné ont ainsi l’occasion de prendre une part du marché qui leur était jusqu’alors refusée dans l’optique de protéger les salles. La situation actuelle fera-t-elle jurisprudence ? [CDP]
> Le cinéma belge à la maison
Cinéma coréen restauré : Korean Classic Film Archive
Sur YouTube, the Korean Film Archive propose un panel rare de films coréens restaurés (en version originale sous-titrée anglais). Des dizaines de classiques peu vus, voire jamais montrés ou carrément introuvables en Europe, en noir et blanc et en couleur, courant depuis l’immédiate après-guerre de Corée (1953) jusqu’à la fin des années 1990. En outre, des cartes blanches sont proposées par des cinéastes actuels reconnus internationalement (Bong Joon-ho, Kim Ki-duk) qui aident le spectateur qui se sentirait désorienté devant la présentation générale du site majoritairement en « hanja » (ou sinogrammes) coréens. [YH]
> Korean Classic Film Archive
Trois cinémathèques (Bruxelles, Paris)
Comme des centaines d’autres institutions culturelles, les cinémathèques ont cherché à s’adapter à la fermeture de leurs portes au public et proposent désormais des films à regarder en ligne.
La Cinémathèque royale de Belgique (Cinematek) propose d’une part, le jeudi après-midi, un rendez-vous hebdomadaire de cinéma muet accompagné en direct par un des pianistes-improvisateurs de la maison (pour le moment, un Chaplin et un programme d’avant-garde muette belge des années 1920) et, en parallèle, fait aussi découvrir sur les plateformes belges de vidéo à la demande (VOD) – UniversCiné, UnCut, Lumière – un film belge restauré par semaine (Chantal Akerman, Paul Meyer, Patrick Van Antwerpen, etc.).
Dans un registre plus étonnant et plus expérimental, le Cinéma du Musée du Centre Pompidou présente chaque semaine un film-essai ou un film-poème (Les Mains négatives de Duras, un film de Joëlle de La Casinière, un court métrage muet de Mikhail Kaufman – frère et chef opérateur de Dziga Vertov –, du trop méconnu Teo Hernandez ou Mass for the Dakota Sioux (1963-1964) de l'expérimentateur Bruce Baillie, qui vient de nous quitter à l'âge de 88 ans, etc.).
Dans cette même logique de découvertes, la Cinémathèque française a ouvert une 4e salle de projection – en ligne – baptisée « Henri », où elle dévoile chaque soir à 20h30 un nouveau court – ou long – métrage (de Jean Epstein, d’Otar Iosseliani, de Raoul Ruiz, de Pierre Clémenti, du studio de production muet Albatros, etc.). Les films muets ne sont pas nécessairement accompagnés de musique et sont parfois, à dessein, laissés silencieux (il s’agit là, depuis des décennies, d’une grande différence entre la cinéphilie à la belge et à la française). [PD]
> site de la Cinematek ~ page Facebook (films muets du jeudi)
> Cinéma du Musée (Centre Pompidou)
> Cinémathèque française ("salle" Henri)
International Documentary Film Festival Amsterdam
Le Festival international du film documentaire d’Amsterdam (IDFA) propose près de 200 films de son catalogue, consultables gratuitement et internationalement en streaming (pour ceux qui habitent aux Pays-Bas, cette offre est étendue à près de 300 films). Ce catalogue regroupe des films de qualité projetés au festival au cours de ces 30 dernières années (de 1989 à 2019) ; la sélection qui est proposée est assez large et représentative d’un cinéma de création ; les formes (animation, essai, enquête, etc.) et les formats (courts, moyens et longs métrages) sont divers et abordent tous les domaines du genre (sciences, arts, société, politique, etc.). Cette initiative est rendue possible grâce à des cinéastes et des producteurs dans le monde entier, qui ont mis leur film (ou plusieurs de leurs films) à disposition du site de l’IDFA, le plus grand festival mondial du film documentaire. Noter que tous les films sont soit en anglais soit sous-titrés en anglais. [MR]
> IDFA (200 documentaires gratuits)
Regards sur le monde : Dérives cinématographiques au long cours
La revue de cinéma en ligne Dérives.tv ne date pas d’hier. Même si l’association lyonnaise vient d’envoyer sa newsletter saisonnière, placée elle-aussi sous le signe du virus, du confinement, de l’effondrement et de notre rapport au monde (cf. ci-dessus), son projet éditorial ne constitue en rien une rustine, une solution temporaire à la crise actuelle, un pis-aller en période de projections cinématographiques interdites. Derrière le paradoxe apparent qui se tend entre un intitulé très poétique et une extension de nom de domaine très étonnant (y a-t-il plus éloigné de ce qu’on associe d’habitude à la télévision que derives.tv ?), se niche un emboitement finement pensé et poncé entre revue papier (3 numéros, à parution très irrégulière – 2007, 2010 et 2015), DVD, projections et programmations et vraie revue Internet associant des dizaines de films en ligne et autant de textes critiques et d’écrits de cinéastes. Le tout généreusement consacré à un cinéma généralement oublié, aux confins du documentaire, du film-essai et du cinéma expérimental, un cinéma d’artisans (Jean-Claude Rousseau, Stephen Dwoskin, Jean Epstein, Chantal Akerman, Jeremy Gravayat, etc.), ouvert aussi aux films produits loin des mégalopoles dominantes de l’industrie (l’Algérie pour Tariq Teguia, le Liban pour Akram Zaatari, le passage du Sénégal au Liban pour Ghassam Salhab, etc.). [PD]
> Dérives.tv
La Parole aux morts, une écoute attentive des vivants
Elle change tout ce qu’elle touche et tout ce qu’elle touche la change. — titre d'un des épisodes de la série "La Parole aux morts"
Tournage en appartement, une seule personne dans le cadre, frontalité, économie apparente des moyens, la disparition des êtres chers comme sujet central : pour qui y regarde trop vite, la série La Parole aux morts de Joffrey Speno peut ressembler à une des déclinaisons possibles des multiples productions vidéo du confinement récent. Mais, dès qu’on s’y attarde, il est clair qu’il n'en est rien. Il y a quelque chose dans la rigueur, mais surtout dans les durées (la durée de chaque vidéo, une heure à chaque fois environ, mais aussi la temporalité de l’entreprise, entamée en 2013 et toujours en cours aujourd’hui) qui ne colle pas avec l’improvisation un peu paniquée de l’audiovisuel du printemps 2020. Par contre, la décision de diffuser chaque semaine un épisode du projet est particulièrement salutaire dans le contexte actuel.
Mais de quoi s’agit-il exactement ? Joffrey Speno est critique de cinéma pour le magazine Diacritik et la revue Répliques (déjà des entretiens au long cours, peut-être un signe… ). La Parole aux morts est une série de vidéos dans laquelle il « recueille les paroles de personnes de son entourage ayant accepté, à l’occasion d’un rendez-vous chez elles, d’évoquer leur rapport à la mort ». Ses amies et amis (une classe d’âge, une unité de lieu : Paris et sa banlieue) sont assis chez eux (dans un fauteuil, sur une chaise, en tailleur sur le lit… ), ils ont été prévenus du sujet de l’entretien, la caméra est fixe, le cadre est soigné, l’image est en noir et blanc. La caméra tourne, le temps passe, Speno n’est pas audible, ne relance pas le discours… Ne pas couper, ne pas relancer est aussi un choix de montage. Dans ce cinéma de la parole, dans cette évocation intime des corps disparus et des fantômes, la pensée qui se perd et le silence qui tout d’un coup se noue, comptent autant – plus, même – que l’éclat d’un verbe triomphant. [PD]
> Joffrey Speno sur Diacritik
> La Parole aux morts sur Vimeo
Deux extraits d’une minute – mais, je le répète, c’est dans la durée que la forme trouve tout son sens :
Numeridanse : 3500 pépites de danse filmée
Très bien conçue, cette plateforme numérique consacrée à la danse (contemporaine, classique, urbaine, traditionnelle, etc.) donne gratuitement accès à 3.500 ressources chorégraphiques, référencées aux quatre coins du globe : créations vidéo et films de danse, documentaires et interviews, fictions et animations, représentations filmées. Chacun des films (œuvre ou extrait d’œuvre) est accompagné, selon sa nature, de textes présentant la création, les chorégraphes, les compagnies, les collaborateurs artistiques, les cinéastes, le générique, etc.
En plus de la vidéothèque (avec accès par chronologie, géographie, type de ressource, contributeur), le site propose des parcours thématiques mêlant images, textes, interviews et extraits vidéo (L’Improvisation, Rencontres avec la littérature, Danses indiennes, Féminin-Masculin, Rituels, Écrire le mouvement, Le Corps et les conflits, etc.), un portail dédié à la jeunesse (des vidéos rigolotes d’initiation et de sensibilisation à la danse, des mini-jeux en ligne ainsi qu’un espace de ressources pédagogiques pour les enseignants), ainsi qu’une sélection de productions audiovisuelles pour le web (vidéos 360°, webdocs, webséries, lignes du temps, etc). [MR]
> Le mot-clé "Danse" dans notre collection de DVD (documentaires, fictions, DVD musicaux, etc. )
> Numeridanse
Musiques filmées : les petites planètes de Vincent Moon
Depuis plus de quinze ans, Vincent Moon voyage, filme, enregistre de la musique et partage tout cela sur son site.
Il a profité de cette période de confinement pour le mettre à jour et propose maintenant plus de 700 films, 250 albums et plein d’aventures et histoires. Voici ce qu’il en dit lui-même sur sa page Facebook :
Je sais ce que vous pensez – on est saturés, avec tant de contenu offert gratuitement, tant d’appels à la participation, à la méditation en ligne, une rencontre virtuelle avec grand-mère, une prise de parole inédite de JLG live depuis sa maison et tant d’autres choses… – mais j’ai mis à jour mon site un peu fou et cela m’a pris 48h pour me replonger dans 15 ans (ou est-ce déjà 20 ans ?) pendant lesquels j’ai fait des films, j’ai enregistré des gens, surtout des musiciens, et je devais partager ceci une nouvelle fois avec vous. J’espère que cela ne vous dérange pas ? — Vincent Moon
Le meilleur moyen d’explorer le site est de partir de la carte (MAP) et de plonger dans la mémoire des peuples et celle de Vincent Moon lui-même. [ASDS]
> site Vincent Moon
> site Petites planètes (aussi Vincent Moon)
Photo de bannière : pxhere.com (photo libre de droits)
Avec la participation d'Anne-Sophie De Sutter, Catherine De Poortere, Philippe Delvosalle, Yannick Hustache et Marc Roesems.