Thomas & Asia - Oniricznie
Fin février, Freaksville nous dévoile de nouveaux venus sur leur label. Thomas et Asia ne sont cependant pas des néophytes et poursuivent, par leur dernier opus, un long cheminement musical.
Asia Obstarczyk est originaire de Pologne. Après des études de violon et de piano, elle joue dans plusieurs comédies musicales. Arrivée en Belgique, elle se frotte à la musique classique, suit des cours de jazz, joue dans le groupe Starcheck et, dès 2015, crée un projet musical appelé Asia O., dans lequel elle emmène le public à travers des récits surprenants ou surréalistes, adoptant un style jazzy inspiré, chaud et délicat. Récemment, elle participe au groupe We, qui interprète des musiques du monde entier en néerlandais. Composé de deux Flamands, d’un Irakien, d’un Burundais et d’Asia Obstarzyk, l’ensemble développe un projet pédagogique en rapport avec l’apprentissage de la langue : tout en jouant, le groupe projette les paroles dans la langue de Vondel. Ils joignent également à leurs représentations un kit pédagogique à l’usage des écoles afin d’y préparer les élèves ou pour y retravailler ultérieurement.
Thomas Sohet déjà adolescent s’est intéressé aux synthés et a commencé à mixer dans les années 1990. C’est donc naturellement qu’il est devenu à la fois producteur, mixeur et musicien. Embarqué pendant sept ans dans l’aventure du groupe Paycheck, avec Asia O. jusqu’en 2015, il s’associe avec le producteur-mixeur Jean Vanesse pour le projet Spirit Catcher. Partenaires de production et de concerts dans toute l’Europe, ils montent un studio à Beaumont dans le Hainaut, l’occasion pour eux de combiner les technologies analogiques et numériques mais surtout d’exprimer leur passion pour les sons, de les créer, de les triturer et de les sublimer. Jupiter, Moog, Juno, Yamaha, Prophet, Roland, Sherman, … conjugués aux mélangeurs et à la technologie informatique leur permet de produire des artistes mais aussi leurs propres compositions (deux albums et de nombreux EP). En 2021, Thomas compose et produit aussi la musique fort appréciée d’une exposition immersive sur Van Gogh à Atlanta.
Durant le « long hiver solitaire de 2020 », Thomas et Asia s’échappent du quotidien par une nouvelle retrouvaille musicale, sans longue préparation, sans multitude de synthés et d’effets sonores. Rien que la sensualité vocale de l’une, le feeling de l’autre au clavier. Quelques instruments, une voix. Et la magie opère. Une musique sortie comme d’un rêve, onirique avec une petite réminiscence polonaise choisie comme titre du EP : Oniricznie, repris sous le label Freaksville.
Les quatre morceaux reprennent un schéma plus ou moins identique : quelques notes de basse au clavier ou quelques nappes agrémentées de petites touches au clavier puis un rythme assez léger après environ une minute. Le tout saupoudré d’une voix suave, charnelle, tantôt aérienne, tantôt ivre. Deux morceaux courts et deux autres dépassant les neuf minutes. « Lunard Brid » démarre sur un son de basse assez vintage tandis que la voix module des onomatopées lentes et onctueuses. « Une petite boîte » use davantage de l’écho pour une musique plus lounge avec un agréable solo qui clôt le titre, puis s’arrête brutalement, nous laissant un peu interdit.
« Pocalunek » (le baiser) est plus fou, plus débranché que les deux précédents. L’âme d’Asia s’envole plus saoule que soul, les mots s’égarent, se juxtaposent, difficile de s’y repérer dans ce voyage enivrant, « parfois ça marche, parfois ça marche pas… ».
Enfin, « Języków wybryki » (langage de bouffon) tend du côté chill-out ; une voix lascive, érotique, danse ses mots, en français, en anglais, … L’improvisation devient savoureuse dans sa durée et, si elle paraît déraisonnable à certains moments, elle se contient dans la dernière minute, nous laissant apaisé et satisfait rassasié.