Tomi Ungerer : un géant au pays des enfants
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Illustrateur aussi généreux que génial, Tomi Ungerer a derrière lui une carrière atypique dont l’originalité n’a d’égal que sa constante pertinence. Car s’il est (re)connu comme un auteur phare de la littérature pour enfants, ce génie frénétique et insatiable a été l’un des premiers à sortir ce « genre » littéraire des sentiers battus. En considérant son public cible comme des adultes en devenir, jouant volontiers sur les sentiments de peur et de surprise, il a insufflé à la littérature enfantine une sérieuse dose de modernité et d’audace. À l’instar d’un Maurice Sendak (Max et les Maximonstres) il n’est donc pas étonnant de s’attarder encore, cinquante ans plus tard, à la redécouverte de ses œuvres.
Les adaptations animées de deux de ses contes (Les trois brigands en 2007 et Jean de la Lune en 2012) et l’accueil public tant que critique qui lui a été réservé témoignent de la vigueur et de l’à-propos qu’ont su conserver ses créations. Tomi Ungerer confronte en effet le bons sens des enfants et les préjugés des adultes. Pas dociles pour un sous, les chérubins font montre d’initiative, de courage et d’une logique toute candide pour mettre à mal celle – pervertie – des grandes personnes. Si cette vision peut amuser aujourd’hui et apparaitre aux yeux des moins réactionnaires comme impertinente, dans les années 1960 elle a du désarçonner plus d’un parent habitué aux mièvreries que l’on servait d’ordinaire à leurs garnements.
Créateur pluriel et indépendant, Tomi Ungerer a su, grâce à sa liberté inventive, affranchir la littérature pour enfants de son carcan normalisant et lui donner un élan neuf, débordant de vigueur.
(Michael Avenia)