Histoires de familles au cinéma
Sommaire
Une médiagraphie réalisée par PointCulture en association avec le B3, Centre de ressources et de créativité de la Province de Liège, destinée à accompagner l'activité Café Ciné sur le thème "Histoires de familles".
Richard Linklater : Boyhood (2014)
Cette réalisation-fleuve prend un parti aussi esthétiquement fécond qu’intelligent d’un point de vue commercial : documenter le passage dans le temps d’une famille fictionnelle en préservant l’intégralité du casting, en ce compris les enfants, depuis leur plus jeune âge jusqu’à leur entrée à l’université. Un objet hybride qui, bien qu’il ne prétende aucunement flirter avec le cinéma documentaire, a néanmoins vocation à proposer une forme de réalité alternative. Car là où l’écriture scénaristique la plus convenue se nourrit essentiellement de moments paroxystiques, Richard Linklater privilégie la mise en scène du quotidien, lequel paraît dès lors à peine joué pour la caméra. (SD)
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Yorgos Lanthimos : Dogtooth (Kynodontas) (2009)
Au prétexte de protéger les siens du monde extérieur et avec la complicité de son épouse, un chef d’entreprise de petite envergure a installé toute sa famille à la campagne, dans une maison circonscrite par de hauts murs. Bercés de mensonges, les enfants séquestrés ont grandi dans l’ignorance et la terreur du dehors. Usant du cinéma comme d’un laboratoire moral, le réalisateur voit dans l’espace domestique et dans l’éducation le lieu privilégié d’une autorité arbitraire et violente dont les effets s’éprouvent, physiquement et mentalement, par une mise en scène recourant aux plans fixes et à des cadres tronqués ajustés au champ de vision étroit des protagonistes. (CDP)
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Barry Sonnenfeld : La famille Addams (1991)
Adapté des illustrations signées Charles Addams, La famille Addams (qui aura déjà eu droit à un portage télévisuel dans les années 1960) propose une vision à la fois originale et pour le moins subversive de la cellule familiale traditionnelle. Humour noir et saillies macabres viennent ici apporter un contrepoint parfait à l’image policée du ménage américain typique du début du XXe siècle. Avec la famille Addams, la normalité est ailleurs. Les notions de bien et de mal s’inversent, se confondent avec force humour et autodérision. L’univers connaitra par ailleurs moult adaptations et déclinaisons (séries télévisées, jeux, films…) (MA)
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Wes Anderson : Fantastic Mr. Fox (2009)
Le très fringant Mr. Fox décide de troquer sa destinée de voleur de poules pour une carrière plus sage de chroniqueur à la gazette locale le jour où il apprend qu’il va être papa. Mais quelques années plus tard, alors que son fiston est mal dans sa fourrure et que débarque son surdoué neveu, Mr. Fox commet à nouveau en douce ses larcins chez les trois éleveurs industriels voisins. S’ensuit une guerre qui saccage son arbre logis et oblige les animaux de la prairie à s’unir contre le péril humain. Un conte animé tiré d’une histoire de Roald Dahl où la solidarité prévaut sur l’instinct naturel (voler) et le déclassement social, et où une certaine forme de parasitisme devient un comportement de combat face à la toute puissante société de consommation. (YH)
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Thomas Vinterberg : Festen (1998)
Ce drame danois, emblématique du mouvement "Dogme95", se déroule lors des 60 ans d'Helge, patriarche d'une famille bourgeoise. Réunis dans le manoir familial, ses proches voient la fête virer au chaos lorsque Christian, l’aîné, accuse son père d'abus sexuels sur lui et sa sœur jumelle qui s'est suicidée peu de temps auparavant. D'abord sous le choc, invités et famille tentent ensuite d'ignorer ces révélations et de rétablir un semblant de normalité. Mais d'autres secrets éclatent, brisant les apparences. La table, souvent symbole d’unité, devient ici un lieu de confrontation où hypocrisie et lâcheté se révèlent. (PB)
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Debra Granik : Leave no trace (2018)
C’est l’histoire d’un père et d’une fille qui s’aiment. Ils forment une famille vivant volontairement en marge de la société. Elle se dissimule dans la forêt, elle communie avec elle. Une situation précaire dans laquelle la famille ne souhaite laisser aucune trace ; la seule tolérée étant l’unique ombre qu’elle forme avec la nature. Le paysage et les personnages ne forment qu’un ensemble sensible, touchant mais conscient que cette verte harmonie ne va pas durer. Le délicat équilibre est sur le point de se fissurer pour laisser place à l’âge adulte, à une autre forme de liberté et d’indépendance. (StS)
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Todd Haynes : May December (2023)
Gracie et Joe se sont rencontrés et aimés alors que Joe était encore un adolescent et que Gracie, de vingt-trois ans son aînée, avait déjà fondé sa propre famille. Sur cette matière inspirée d’un fait divers, ce couple né d’un scandale met au jour la substance foncièrement perverse au cœur des institutions et des sacrements. Pour un réalisateur depuis longtemps attaché à filmer des femmes en lutte contre l’étroitesse de leur cadre de vie, le foyer n’est pas un abri garant de l’authenticité des liens. Edifié comme un rempart contre la société, celui de Gracie et Joe doit sa belle apparence à ce qu’il repose sur une fiction où l’on joue sa propre vie. (CDP)
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Kiyoshi Kurosawa : Tokyo sonata (2008)
Une famille japonaise s’ouvre peu à peu au monde à mesure qu’elle se désintègre. L’autorité du père, l’obéissance de l’épouse et des enfants sont autant de formes d’aliénation dont le film, sous des dehors tragicomiques, raconte la dérive. Elaboré sur des silences et des dialogues minimalistes, celui-ci tire son ampleur des désirs qui bruissent dans une maison où l’on ne communique pas et que l’on cherche à fuir. Si la musique relève de cette fonction à travers la passion que le plus jeune enfant nourrit en secret pour le piano, en tant que discipline artistique elle représente une transgression lumineuse et plus encore une issue à un ordre social mortifère. (CDP)
Terrence Malick : The Tree of Life (2011)
Devenue un thème récurrent pour Terrence Malick, la foi chrétienne est abordée par le prisme de la famille nucléaire. Tracée de façon arbitraire, la ligne qui délimite le pré carré d’un petit propriétaire foncier renvoie ici à l’organisation d’une nature – ici, la pelouse – cherchant uniquement à croître tant qu’elle n’est pas placée sous tutelle, celle de Dieu et de ses adeptes. La métaphore s’insinue jusque dans l’éducation du père, homme rigide et intransigeant qui, à l’image de l’autorité religieuse, professe à sa progéniture des commandements qu’il se garde bien d’embrasser lui-même. (SD)
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Arnaud Desplechin : Un Conte de Noël (2008)
Dans Un Conte de Noël, la fête de la Nativité est commodément convoquée pour réunir les membres d’une famille dysfonctionnelle autour de leur plus petit dénominateur commun : l’état de santé préoccupant de leur doyenne, laquelle requiert incessamment une greffe de moelle osseuse. Sur cette base, la tribu desplechienne est ainsi figurée tel un assemblage hétéroclite de personnalités ne s’étant manifestement pas choisies l’une l’autre. A rebours des récits mièvres et politiquement corrects, prompts à brandir l’amour filial quitte à édulcorer la réalité la plus vraisemblable, le film nous fait retoucher le sol : c’est bien la compatibilité du donneur qui, avant tout, conditionne cet ultime don de soi. (SD)
Hirokazu Kore-Eda : Une affaire de famille (2018)
Avec Une affaire de famille, Hirokazu Koreeda entretient longtemps le flou quant à la nature des liens qui unissent les protagonistes dont il est question. Cette façon de brouiller les pistes place les spectateurices devant la tentation de céder à leurs préconceptions du clan, et ce afin que ce qui leur est montré puisse désespérément faire sens. Traversé par les questions éthiques et sociales dont le cinéaste est coutumier, le film met à mal les évidences en matière de relations filiales, rappelant de façon opportune qu’un géniteur ne fait pas nécessairement un parent. (SD)
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Étienne Chatiliez : La vie est un long fleuve tranquille (1987)
La vie est un long fleuve tranquille pour les Groseille et les le Quesnoy, deux familles nombreuses qui vivent chacune à leur façon, qui se frôlent mais ne se touchent pas dans ce quartier du nord de la France. Mais l’élément qui maintient cette disparité va être diablement saccagé et drôlement abîmé par la révélation d’un secret vieux d’une dizaine d’années : un échange de nouveaux-nés entre ces deux familles ! Un portrait corrosif des inégalités et des différences sociales. Une comédie délirante et intelligente, aux répliques devenues cultes qui nous fait à la fois rire et réfléchir. (StS)
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Une médiagraphie de PointCulture réalisée par Michaël Avenia, Pierre Baps, Simon Delwart, Catherine De Poortere, Yannick Hustache et Stanis Starzinski.
Crédit photo : © pexels-suzyhazelwood-3617568
Cet article fait partie du dossier Médiagraphies | 2022-25.
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