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Un BIFFF 2024 "à la française"

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horreur, France, science fiction, polar, jeux vidéo, fantastique, BIFFF2024, comédie horrifique

publié le par Yannick Hustache

Régulièrement tenu à l'écart des sélections officielles et autres grands raouts célébrant le 7ème art et relégué sur le banc des réservistes médiatiques d'un cinéma blanc-bleu-rouge, pluriel par essence, le film de genre "à la française" (entendez ici le fantastique au sens large, la S.F. et le polar...) a toujours eu sa petite place de choix au sein des programmations historiques du BIFFF.

Sommaire

Lors de la remise des Césars 2024, Le Règne animal de Thomas Cailley repart avec cinq statuettes alors que le film n'a pas encore achevé sa carrière en salles. Cette fable de fin du monde avait auparavant reçu de bonne critiques tant nationales qu'internationales à l'instar du moins médiatisé et néanmoins percutant Vincent doit mourir de Stephan Castang, sorti à peu près au même moment. La (peut-être) bonne nouvelle derrière cette introduction factuelle est qu'elle pourrait annoncer la fin de la relégation presque automatique des cinémas de genre (et même topo pour ce qui concerne le cinéma d'animation) à l'arrière-plan médiatique, ou sa mainmise par les éditeurs, revues, sites et chaînes du web "spécialisés" en la matière. Comme si ces cinémas n'étaient finalement que la D2 du 7ème art : réservés à des publics spécifiques et de toutes façons incapables de proposer des films qui rivalisent par leurs qualités thématiques et artistiques propres avec "le grand cinéma ". Et l'on se plait plus que jamais à espérer une montée en puissance du temps de débat consacré au cinéma de genre au sein du landerneau de la critique journalistique et de la sphère culturelle en général (on se souvient encore du tollé puis de la polémique qui suivit quand Titane de Julia Ducournau reçut sa palme d'or à Cannes en 2021), toujours si prompte à s'enflammer dans des échanges passionnés pour n'importe quel long-métrage dit "d'auteur" (dont le terme ne s'appliquerait pas ici) ou pour une énième œuvre d'un.e cinéaste reconnu.e, et à ne se pencher qu'occasionnellement sur les formes radicales de cinéma quand elles viennent de France, comme si le fantastique, l'horreur et la S.F. relevaient d'une spécificité typiquement anglo-saxonne ou d'ailleurs. C'est oublier un peu vite que Georges Méliès, à l'origine de bien des procédés de cinéma utilisés encore aujourd'hui, est né à Paris et que Jacques Tourneur, bien qu'ayant fait l'essentiel de sa carrière à Hollywood et qui a livré en son temps quelques classiques fantastiques intemporels a lui aussi grandi en terre de France !

PointCulture s'est donc égaré dans le wikibifff (une base de données d'accès gratuit) qui recense la très longue liste de films passés au festival lors de ses 41ème éditions précédentes, pour en extraire une grosse quinzaine de films et de jeux vidéos qui vous fera connaître ou redécouvrir quelques pans méconnus du riche cinéma d'outre-Quiévrain. (YH)


CINEMA

Vincent Garenq : Au Nom de ma fille (2015)

Quand en 1982, André Bamberski apprend le décès de sa fille en visite chez son beau-père Dieter Krombach, médecin en Allemagne, il soupçonne ce dernier d’être responsable non seulement du meurtre mais aussi du viol de sa fille. Commence alors pour l’homme, un harassant marathon judiciaire transfrontalier de plus de trente ans. Un combat obstiné sur l’autel duquel il finira par écourter sa carrière professionnelle, s’éloigner de son fils et de ses amis, et hypothéquer son second mariage. Les lenteurs des procédures judiciaires et « le talent » de Krombach, sur lesquels les accusations de viols répétés s’accumulent, à se faufiler entre les failles et frictions des Droits français, allemand et autrichien (les États ont tendance à protéger leurs ressortissants) vont le conduire aux limites de la légalité et même du côté du banditisme. Le film tient la corde des faits et du temps qui inexorablement passe et use, sans jamais verser dans le pathos accusateur ni la dénonciation apitoyée. Reste parfois l’impression de seconds rôles (son ex-femme, sa famille) laissés en jachère. (YH)

Julien Maury - Alexandre Bustillo : Aux Yeux des vivants (2014)

Une mère tente de tuer son enfant mais est arrêtée in extrémis par le père qui lui fait la peau, s’empare du couffin puis s’évanouit dans la nature. Quelques années plus tard, dans une campagne française baignée de chaleur et tranquille en apparence, trois gamins des plus dissipés n’attendent même pas le dernier jour de classe, pour faire l’école buissonnière. Déboulant un peu par hasard dans l’enceinte d’un ancien studio de cinéma en ruines, les enfants tombent sur le « refuge » d’Isaac et Klarence Shooter, les deux fuyards du début dont l’un est devenu un géant toujours masqué, et qui s’adonnent à de bien étranges pratiques meurtrières. Apeurés par ce qu’ils ont vu, les trois enfants s’en retournent chez eux sans savoir que le croquemitaine est sur leurs talons. Ce Halloween / Candyman / Massacre à la tronçonneuse très référencé à la française réussit à instiller une atmosphère glauque et oppressante et offre le bon dosage entre violence expressive et allusive. Le film pâtit quand même de quelques indigences scénaristiques, assez dommageables. (YH)

Jonathan Barré : Bonne conduite (2023)

Dans cette parodie de thriller policier, le cinéaste Jonathan Barré se joue des codes du genre et les tourne en dérision. Ses anti-héros, aux abords caricaturaux, s’avèrent en fin de compte beaucoup moins dangereux qu’ils n’en ont l’air, mais surtout plus nuancés. A commencer par la principale protagoniste, Pauline, tueuse en série aux motivations nobles, pour ne pas dire légitimes. A travers son personnage de psychologue accompagnant des chauffards récidivistes vers la récupération de leurs points de permis, le réalisateur propose à sa manière une réflexion, toute légère qu’elle soit, sur la sécurité routière. La musique lancinante et les effets spéciaux délibérément grotesques prêtent à sourire mais, ne se prenant pas au sérieux au contraire de maintes productions francophones cherchant à singer le cinéma étatsunien, l’œuvre n’a pas peur du ridicule et assume son statut de comédie potache dont l’humour rappelle les grandes heures du Palmashow. (SD)

Jean-Baptiste Leonetti : Carré blanc (2011)

Une société miroir de la nôtre ; urbaine, surpeuplée, froide et grise mais où l’organisation de la société repose sur une forme achevée de darwinisme social et entrepreneurial. Ceux qui dirigent sont les mêmes qui ont réussi avec succès les épreuves (ou jeux) létaux qui leur sont imposés, les autres, perdants ou déclassés finissent en viande froide, prête à être retraitée et consommée. Devenu un brillant maillon de cette impitoyable chaîne à sélectionner, Philippe, ancienne pupille de l’État est mariée à Marie, également orpheline, et qui l’a autrefois sauvé après une tentative de suicide. Mais son couple est au bord du naufrage et Marie éprouve de plus en plus de mal à supporter ce qu’ils sont devenus et la société dont ils sont les emblèmes. Elle décide de tenter le tout pour le tout ! Dans cette fable sociétale pas totalement désespérée, outre un casting impeccable (avec une Adèle Exarchopoulos encore enfant), le réalisateur étaye son propos par une mise en scène qui fait la part belle aux formes géométriques épurées et menaçante, aux jeux d’ombres et de reflets en continu dans des décors granuleux chargés de symboles d’oppression. Un film qui confine à l’abstraction, parfois asséché par le manque de moyens, mais lesté d’une étrange beauté métallique en clair/obscur. (YH)

Léa Mysius : Les Cinq diables (2022)

Vicky, une petite fille solitaire voue un attachement viscéral à sa mère Joane. Elle possède un sens olfactif hors du commun. Mais la vie de l'enfant change radicalement à l’arrivée de sa tante Julia au sein d’une famille en crise,et semble éveiller chez Vicky de bien curieuses facultés paranormales. Sur un somptueux décor alpin aux couleurs de feu (c’est l’automne) et porté par un formidable duo d’actrices (Sally Dramé et Adèle Exarchopoulos), Léa Mysius parvient à injecter les meilleurs éléments de la cinéphilie fantastique plutôt américaine qui l’a construite, pour raconter au final une vraie histoire d’amour imprégnée de sorcellerie moderne (et donc de féminisme). On part Du Carrie de Brian de Palma (l’incendie) pour demeurer longuement en territoire Lynchien (les intimités anxiogènes, l’étrangeté familière, une structure narrative en forme de ruban de Möbius…) et les subvertir de l’intérieur par des tons fauves et minéraux et un possible happy end. (YH)

Luc Besson : Le Dernier combat (1983)

Dans un monde post-apocalyptique où il ne reste pratiquement plus que du sable et des ruines, quelques survivants – des hommes – tentent de s’accaparer les restes quand d’autres espèrent recréer un embryon d’humanité. Parmi cette faune mâle qui, comme dans La planète des singes, semble avoir perdu l’usage de la parole, un solitaire plus futé que la moyenne, capable de faire voler un avion de fortune, et un médecin qui séquestre dans une pièce tenue secrète de son hôpital déserté et en lambeaux une jeune femme, qui par sa seule présence (et celle des réserves de nourriture du bon docteur) semble attirer tous les rustauds mal léchés des alentours. Dans son premier film, Luc Besson s’essaie au genre fantastique fauché de fin du monde, mais relevé d’une pointe de burlesque (?) chaplinesque avec son noir et blanc à gros grain et ses effets comiques (involontaires ?). Ça cale parfois côté rythme, présente un coup de mou en son centre et dans la B.O. – pas l’élément le plus remarquable du film – signée par un inconnu qui ne le restera plus longtemps, Éric Serra, mais c’est certainement le film de Luc Besson qui résiste le mieux à l’épreuve du temps. (YH)

F. J. Ossang : Docteur Chance (1997)

À Toulouse, au milieu des années 1970, alors âgé d’une vingtaine d’années, F. J. Ossang se lance dans la littérature par l’édition d’une revue et l’écriture de ses propres textes poétiques. Il y crée un groupe punk : DDP (« De la destruction pure »). Au début des années 1980, il monte à Paris pour y suivre des études de cinéma à l’IDHEC et y créer un autre groupe : MKB Fraction provisoire (Messagero Killer Boy). Ses films très marqués par son amour du cinéma muet et du cinéma de genre font se rencontrer septième art, rock et poésie. Entre film noir et road movie (trafic de faux tableaux en Amérique latine), son troisième long métrage est un film qui peut s’écouter autant qu’il se regarde : le montage particulièrement soigné de la musique (de MKB, de Nick Cave, du Gun Club ou du groupe bruxelloix La Muerte), des sons et des voix installe une sorte de « film pour les oreilles » parallèle au tout aussi soigné « film pour les yeux » (camaïeu de verts, d’oranges et de bruns). Ces deux bandes (bande-son et bande-image) jouant tantôt de leur rapprochement et de leur synchronicité, tantôt de leur éloignement et de leur décalage… (PD)

René Laloux : Gandahar (1987)

Entre son premier long-métrage en 1973, La Planète Sauvage, et Les Maîtres du Temps, en 1982, tous deux des adaptations de romans de science-fiction de Stefan Wul, René Laloux a entamé un projet avec un autre auteur français, Jean-Pierre Andrevon. Ils se mettent d’accord pour réaliser un script basé sur un livre de ce dernier, Les Hommes-machines contre Gandahar, paru en 1969. On y voit une civilisation pacifique et harmonieuse, peuplée de lointains descendants des terriens, envahie et menacée de destruction par une armée de robots humanoïdes sortis de nulle part. Cette agression brutale va également révéler la face sombre de la société et les secrets douloureux que dissimule une façade idyllique. René Laloux choisit d’inclure dans le projet Philippe Caza, dessinateur de bandes-dessinées (notamment pour Les Humanoïdes associés) et illustrateur de science-fiction. Les premiers travaux débutent en 1977, et un premier pilote est réalisé. Mais le projet s’enlise pour des raisons financières et chacun rentre chez soi. Ce ne sera que dix ans plus tard qu’une solution sera trouvée et que le film sera dessiné et tourné dans un studio de Corée du Nord, à Pyongyang. La volonté de mener à bout l’entreprise a obligé les auteurs à de nombreux compromis, et les splendides dessins originaux de Caza, au trait fin et complexe, va devoir être lissé et extrêmement simplifié pour répondre aux délais et aux contraintes budgétaires. Il n’en restera souvent trace que dans les décors, et l’imaginaire foisonnant des personnages pâlira parfois dans leur animation quelque peu rudimentaire. (BD)

Julia Ducournau : Grave (2016)

Jusque-là essentiellement associée à une stratégie de survie, la représentation du cannibalisme dans le cinéma de fiction se mue en un véritable atavisme avec Grave. La phase d’exposition du film, axée sur l’entrée du personnage de Justine en études de médecine vétérinaire, exploite les nombreuses équivoques qui permettent à Julia Ducournau de faire basculer son film dans le cinéma de genre. Par son statut de bizute, soumise aux humiliations ludiques mais non moins sanglantes de ses aînés, Justine se voit contrainte d’ingérer des abats d’animaux malgré un vœu affirmé de végétarisme. De là s’enchaînent une série d’événements propres à lui révéler ce qui constitue sa nature profonde. De par la prédilection à la fois neuve et obsessionnelle de sa protagoniste pour les corps dénudés, le film suggère par avance une fin dramatique, quoique savamment amenée. (SD)

Pascal Laugier : Ghostland (2018)

Une mère et ses deux filles héritent d’une vieille et immense bicoque au milieu de nulle part. Mais à peine arrivées, elles sont surprises par deux individus terrifiants qui ne leur veulent pas vraiment du bien. Tourné en anglais (avec quelques tirades en français ci et là) et se déroulant « quelque part » aux USA, Ghostland tire dans un premier temps la ficelle narrative du « retour quinze années après sur les lieux du drame » et celle du destin en sens opposé des sœurs ayant subi un choc traumatique profond, pour mieux sonder les méandres du cauchemar, de l’illusion, de la coercition mentale et de la mort. Dans ce décor de manoir hanté où les poupées ont des regards très humains et les croquemitaines des oripeaux de carnaval freak, la survie (le salut) vient de l’amour que les deux sœurs se portent. Une brillante variation (bien qu’un peu cheap) d’un thème horrifique archiconnu (le trauma et la réalité fragmentée et illusoire) qui refile la clé de son explication dernière au spectateur, sous l’œil impavide de l’écrivain H. P. Lovecraft dont la longiligne silhouette s'invite dans l'imaginaire du film ! (YH)

Julia Ducournau : Titane (2021)

Alexia possède une plaque en titane dans le crâne depuis un accident de la route étant petite. Aujourd’hui, elle se dévoile en tant que show girl dans les concentrations de voitures tunées pour lesquelles elle éprouve une attirance quasi sexuelle, et tue les inopportuns qui la serrent d’un peu trop près. Après une succession de meurtres dont celui de ses parents, elle est contrainte de prendre la fuite, déguisée en garçon, avec dans son ventre, le fruit étrange de ses amours avec une Chevrolet ! Elle est recueillie par Vincent, un officier du corps des pompiers, lequel croit reconnaitre dans ce garçon malingre bien peu loquace et qui se fait désormais appeler Romain, son fils disparu dix ans plus tôt. Une bien étrange relation (d’adoption) va naître entre cet homme massif, brisé qui tient grâce à ses piquouzes quotidiennes et son hébergé(e) dont le ventre grandit chaque jour un peu davantage. Célébré ou chahuté à et après Cannes, Titane demeure un fascinant objet de cinéma. Violent, têtu et radical comme un titre de gabber (techno sale et ultra-rapide), irréductiblement « cronnebergien » (Crash comme indépassable horizon de sexualité mécanique et morbide, La mouche pour son processus de métamorphose en cours), le film baigne par ailleurs dans une lumière de néon rosé, artificielle et organique qui épousent des corps meurtris ou sculptés (les pompiers s’amusent…) ou dans le cas d’Alexia, violenté de l’extérieur (son nez cassé) et de l’intérieur (elle pisse de l’huile). Esthétisé à outrance, provocateur, se saisissant des questions d’identités de genre et de filiation à bras le corps (mutant), Titane se tient comme suspendu entre le coup de génie cinématographique et l’exercice de style emphatique.(YH)

René Manzor : 36-15 Code Père Noël (1989)

Les années 90 pointent le bout du nez quand René Manzor réalise 36-15 Code Père Noël. René Manzor, alias René Lalanne, de la confrérie Lalanne. Galaxie familiale totalement impliquée dans ce long métrage entre réalisation, production, composition et interprétation !

Trente-cinq années ont sonnés depuis, trente-cinq réveillons de Noël se sont écoulés. Trente-cinq hivers que le minitel, très en vue à l’époque, a disparu des radars de l’informatique. Il y a d’autres moyens aujourd’hui pour contacter un père Noël sanguinaire avec les réseaux sociaux et autres applications mobiles.

Car c’est l’histoire du film. Une invitation le soir du réveillon qui tourne mal. Le jeune Thomas, qui a aménagé le manoir dans lequel il vit avec sa famille en parc d’attraction remplis de pièges et autres embuscades, encode le ’36-15 code père Noël’ dans la boîte magique. Il veut se convaincre que le père Noël existe et sollicite une rencontre. Mais c’est un être déséquilibré, avide de vengeance car la maman de Thomas l’a renvoyé quelques heures plus tôt, qui apparaîtra en lieu et place du papa Noël. Le duel peut commencer à coups de poursuites sanglantes et de références cinématographiques d’époque. Rambo, Commando, Maman j’ai raté l’avion notamment (même si ce dernier sortira quelques mois après dans les salles). Sans oublier la coupe mulet du jeune garçon. Film de genre français qui, malgré un vieillissement certain, a toujours sa place dans les filmographies de fin d’année. (StS)

Claire Denis : Trouble Every Day (2001)

Le cannibalisme ayant depuis longtemps perdu son caractère sacré, et par là toute portée collective, une conception moderne voudrait que le phénomène désigne un désir charnel poussé à son extrême. Or, ce qui est vrai des sociétés civilisées l’est également dans la fiction où l’anthropophagie figure désormais une déviance individuelle, une pathologie gore susceptible de n’intéresser qu’un certain cinéma de genre. Hors de ce cadre-là, la façon très personnelle dont Claire Denis se saisit du motif dans Trouble Every Day tend malgré tout à le rabattre sur une pulsion vécue comme un désordre intime, renvoyant à sa propre vision du couple en crise, mû par des intensités incontrôlables. Sans interroger plus avant ces enjeux manifestes, la réalisatrice abandonne son film à un flux d’images travaillées comme des tableaux. Plutôt que la subversion, elle va chercher l’émotion sur le visage d’une jeune femme vivant recluse, parvenant on ne sait comment à s’échapper la nuit pour se repaître du corps d’amants ramassés au bord d’une route. Le destin de cet être barbouillé de sang auquel Béatrice Dalle confère un attrait enfantin semble lié à celui d’un Américain fraîchement débarqué à Paris, joué par Vincent Gallo, sorte de dandy malade et anémié, visiblement insatisfait de sa relation avec sa jeune épouse. Un même tourment s’exprime à travers ces personnages, celui d’un monde où sexe et sentiment ne peuvent fusionner. Cet état de fait passe par un montage alterné faisant grâce à un renversement du romantisme. Que se passe-t-il alors si c’est la chair qui l’emporte ? Bercé par la musique langoureuse des Tindersticks, le film n’offre aucun commentaire à ce qu’il met en scène, multipliant plutôt les indices matériels comme autant d’effets d’ombre et de lumière venant caresser son objet dès lors réduit à une pure hypothèse. Déconnecté du sentiment amoureux, l’acte sexuel qui culmine en une pulsion dévoratrice rejoint le constat sadien d’un rapport où, du fait de leur excitante proximité, jouissance et agonie se confondent. (CDP)

Kristina Buozyte et Bruno Samper : Vesper Chronicles (2022)

Projeté en ouverture de la 40e édition du BIFFF en 2022 et récompensé par le Corbeau d’or, Vesper Chronicles est un conte écologique. Dans un avenir indéfini, mais qui pourrait ne pas être si lointain, les dérives des expériences génétiques ont conduit à l’effondrement complet des écosystèmes. Les plantes comestibles et les animaux ont été anéantis tandis que l’humanité, ou ce qu’il en reste, est divisée en deux. Une élite, retranchée dans les citadelles, règne par la force et le contrôle des semences sur les rares populations luttant pour survivre dans un environnement dévasté. N’usant pas d’effets spéciaux grandiloquents, le film mise sur quelques personnages forts et un univers visuel léché et immersif. Dans ce nouveau Moyen Âge, la jeune Vesper est à la fois l’ado rebelle et l’héroïne par qui le changement pourrait arriver. Bio-hackeuse déterminée et audacieuse, elle poursuit l’espoir de produire un jour des graines fertiles. (GB)

Quentin Dupieux : Wrong Cops (2013)

Wrong Cops est le quatrième long métrage du farfelu Quentin Dupieux (aka Mr Oizo) : en plus de la réalisation, il s'est chargé de la photographie et de la bande son. Il s’agit de plusieurs courts métrages, à la suite les uns des autres, destinés à former un film d’1h30. On atterrit dans un commissariat à Los Angeles composé de flics demeurés et vivant de leurs petites combines jusqu’à ce qu'un événement bouleverse cet équilibre. Tous les éléments qui ont fait la singularité du réalisateur se trouvent ici rassemblés, dont l’humour, grinçant et absurde. (JDL)

Georges Franju : Les Yeux sans visage (1960)

« On m’a enlevé les miroirs, mais il y a les vitres qui me reflètent quand la fenêtre est ouverte. Il y a tout ce qui brille : les couteaux, le bois vernis… Ma tête me fait peur. Mon masque me fait plus peur encore. » Entre horreur et féérie, entre épouvante et poésie, Georges Franju met en scène pour cet exemple rare de film fantastique français, un chirurgien (le Professeur Génessier – Pierre Brasseur) tentant par tous les moyens – y compris les plus illégaux et immoraux – de greffer un nouveau visage à sa fille (Edith Scob) défigurée lors d’un accident de la route qu’il a provoqué. Dans un superbe noir et blanc en clairs obscurs signé Eugen Schüfftan (le directeur photo de Metropolis et de Les Hommes le dimanche), soutenu par une partition de sons de cloches, de croassements de corbeaux et d’aboiements de chiens, « le quotidien se dérègle imperceptiblement, l’espace devient labyrinthique, les objets paraissent vivre, les voitures sont des personnages. » (Pascale Risterucci, autrice du livre « Les Yeux sans visage » aux Éditions Yellow Now). (PD)


JEUX VIDEO

Dead Cells (Motion Twin, 2017)

Dead Cells est un jeu vidéo qui combine des éléments de jeux d'action, de roguelike et de metroidvania. Le jeu a été développé et publié par le studio de Montpellier Motion Twin. Dans Dead Cells, le joueur prend le contrôle d'un amas de cellules qui prend possession du corps d'un cadavre dans un donjon, à travers lequel il doit se frayer un chemin. Connu pour son niveau de difficulté élevé et ses mécaniques de mort permanente (où la perte de toutes les vies entraîne le début d'une nouvelle partie depuis le début), son système de progression non linéaire encourage l'exploration et l'expérimentation.

Début 2023 est sorti un supplément à l’histoire principale : Return to Castlevania. Les joueurs peuvent explorer de nouvelles zones qui rendent hommage aux décors gothiques et aux atmosphères sinistres caractéristiques du jeu Castlevania. Ces zones sont remplies de monstres et de pièges inspirés de la série mythique de Konami. (TM)

Inspector Waffles (Goloso Games, 2021)

Véritable madeleine de Proust, Inspector Waffles rend hommage à la fois aux jeux vidéo d’énigmes point and click à la Monkey Island avec son lot de pixels. L’inspecteur Waffles est un matou confronté au meurtre d'un industriel bien-aimé dans la ville de Cat Town. L’inspecteur aux pattes de velours doit surmonter les souvenirs douloureux de ses anciennes enquêtes pour résoudre cette affaire complexe en duo avec son coéquipier canidé Spotty. Votre mission consiste à parcourir la ville pour trouver des indices, interroger des suspects variés et démêler un mystère intriguant.

Amateurs de jeux d’énigmes à l’humour ravageur, ce jeu est pour vous. (TM)

Steel Rising (Spiders studio, 2022 )

Steel Rising, un jeu vidéo d’action développé par le studio parisien Spiders.

L’action se situe dans une version alternative de la Révolution française, où les machines de guerre animent les rues de Paris. Dans ce monde, l'histoire prend un tournant fantastique avec l'introduction d'automates créés par l'inventeur du roi, qui servent à réprimer violemment les révolutionnaires. Les joueurs incarnent Aegis, un automate exceptionnel doté de capacités de combat avancées, ayant pour mission de naviguer dans les rues de Paris en proie au chaos, afin de mettre un terme à la tyrannie des machines

Le jeu se distingue aussi par le travail de l’art designer Cyril Tahmassebi alliant des éléments de la Renaissance et l’imagier steam punk. (TM)

Stray (Twelve Studio, 2022)

Jeu vidéo d'aventure développé par le studio français de Montpellier BlueTwelve. L'histoire commence avec la chute d’un chat, incarné par le joueur, qui termine sa descente vertigineuse dans une ville futuriste souterraine remplie de robots. Aucune trace d’humain dans la ville. Le chat doit découvrir ce qui est arrivé aux humains qui ont construit cette ville et pourquoi la lumière du jour n’est plus présente.

Le jeu a reçu le Game Awards du meilleur jeu de l’année 2022 ainsi que le Pégase du meilleur jeu vidéo français. (TH)

BRUSSELS INTERNATIONAL FANTASTIC FILM FESTIVAL (BIFFF2024)

Du 09 au 21 avril 2023

Places "express" à gagner BIFFF2024

Heysel, Brussels Expo, Palais 10 : BIFFF2024

Une médiagraphie réalisée par Jean De Lacoste, Stanis Starzinski, Geoffrey Briquet, Catherine De Poortere, Philippe Delvosalle, Simon Delwart, Benoit Deuxant, Yannick Hustache et Thierry Moutoy.

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