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Louis Philippe

Louis Philippe

publié le

Un excentrique français ? Le spécimen, plutôt rare, aurait certainement plu à la romancière et poétesse Edith Sitwell, auteur d’un savoureux ouvrage Les excentriques anglais et nul doute que G.K. Chesterton, à son contact, n’aurait guère hésité à […]


Un excentrique français ? Le spécimen, plutôt rare, aurait certainement plu à la romancière et poétesse Edith Sitwell, auteur d’un savoureux ouvrage Les excentriques anglais et nul doute que G.K. Chesterton, à son contact, n’aurait guère hésité à consacrer un chapitre supplémentaire à son Club des Fous. Doté d’un C.V. aussi échevelé qu’un cadavre exquis, la carrière polymorphe de Louis Philippe (Philippe Auclair de son nom de baptême), Français établi à Londres depuis vingt ans, est de celle qui, dans une attitude splendide et une scandaleuse confidentialité, inflige un camouflet au conformisme rock, avec un tendance très marquée au tongue-in-cheek, à la sophistication outrée et au décalage subtil. Et son parcours, tortueux, est de ceux dont on se plaît à suivre la trace, de la perdre au détour d’une éclipse, pour en retrouver l’ornière quelques années plus tard, avec le même bonheur. Sa palette musicale enveloppe autant la pop bubblegum, la chanson jazzy, la bossa nova ou les mélodies de Poulenc. Un esprit punk sous un plumage lounge.

Philippe Auclair est né en 1959 en Normandie au sein d’une famille de riches propriétaires terriens. Féru de musique dès son plus jeune âge (il relate d’ailleurs dans une interview l’enchantement éprouvé -à cinq ans!- à l’écoute du Quiet Village de Martin Denny, une pièce maîtresse de l’Exotica), ce n’est qu’après des études de philosophie effectuées à l’École Normale Supérieure de Paris, en 1985, qu’il enregistre son premier disque au sein d’une formation power pop, The Border Boys. Sa maison de disques d’alors n’était autre que Les Disques du Crépuscule, label bruxellois fondé par Michel Duval qui dégageait un parfum de mélancolie dandie - en partie due à la ligne esthétique élaborée par le graphiste attitré du label, Benoît Hennebert - et dont le catalogue télescopait post-punk, chanteuses-actrices, musique minimale, new wave maniérée ou jingle-jangle pop. Expatrié à Bruxelles, Auclair partage son temps entre la musique et… la restauration à l’Interférence, le club du label situé sur la Grand-Place. The Border Boys se dissout rapidement pour se reconstituer fugitivement en The Arcadians, savoureuse parenthèse pastorale aux accents de bossa nova.

Une rencontre décisive avec le Britannique Mike Alway - alors responsable de la prospection d’artistes pour Blanco Y Negro, label créé par Rough Trade, Cherry Red et Crépuscule - le conduit à Londres et à s’arrimer au fol esquif él Records. Durant quatre ans, son existence de musicien sera indissociablement liée à cet exceptionnel label pop qui, sans un penny, cultivait l’humour, le simulacre, le snobisme de pacotille avec un égal bonheur. Un îlot de fantaisie, d’ironie et d’easy listening qui aura vainement lutté contre un monde rock chevillé dans sa grisaille et ses mots d’ordre se résumant à «authenticité» et «colère».

Afin de parfaire le tableau, il se choisit un surnom, celui du dernier monarque français, conduit à l’exil à la fin de son règne : Louis Philippe. Suivant l’exemple des usines à hits des années 60 (Motown, le Brill Building à New York, etc.), on le consacre l’homme à tout faire du label. Et le voilà prodiguant ses talents de compositeur/arrangeur/producteur pour Kings of Luxembourg, Anthony Adverse, Bad Dream Fancy Dress, etc. et se donnant à peine le temps d’échafauder ses premières œuvres solo. Les quatre albums produits à cette époque tentent de renouer tout à la fois avec le bonheur insouciant de la pop des années 60, la bossa nova et un certain jazz vocal français (Les Double Six). Prenant au premier degré la devise « Pourquoi faire simple lorsqu’on peut faire compliqué », ils témoignent d’une propension à l’architecture pop ambitieuse et extravagante, au risque de se perdre parfois dans ses multiples entrées comme sur Gagarine, dernier disque conçu pour él. À noter que la chanson-clé de cet album apparaît comme un fil rouge narratif dans le roman de l’auteur anglais Jonathan Coe Testament à l’anglaise.

En compagnie de Dean Brodrick, il enregistre au début des années 90 deux disques (Rainfall et Jean Renoir) composés uniquement d’une multitude de pistes vocales et de piano, œuvres parmi les plus expérimentales de sa discographie. Delta Kiss et surtout Sunshine (enregistré avec Bertrand Burgalat) qui leur succèdent touchent, quant à eux, à la quintessence de l’art de Louis Philippe: une écriture extrêmement précieuse et référencée (Brian Wilson, Michel Legrand, Tom Jobim) sans que, cette fois, elle n’égare en chemin la clarté de ses intentions pop. Et des textes dont la charge ironique et l’apparent clinquant laissent se faufiler une profonde mélancolie. Parallèlement, il s’est donné le temps de collaborer aux albums de Martin Newell, Valérie Lemercier, Nina Morato, April March ou de la Bruxelloise Laila Amezian (Studio Pagol).

Initialement défiant à l’encontre d’une industrie du disque qu’elle soit multinationale ou indépendante, il s’en est aujourd’hui quelque peu détaché, consacrant le plus clair de son temps à ses activités de chroniqueur sportif (football, rugby et cricket obviously) au service Sport du BBC World Service, de correspondant à Londres pour l’hebdomadaire Marianne. Plus récemment, on a pu le découvrir analyste politique dans Le Royaume enchanté de Tony Blair (Fayard), livre-pamphlet dénonçant les méfaits sur toutes les strates de la société anglaise du newspeak (novlangue) en vogue dans les coulisses du pouvoir à Downing Street. Quant à ses disques, en humble artisan soutenu par une fidèle armée de l’ombre, il en poursuit l’écriture hors des circuits traditionnels de production et de distribution, tel The Wonder of It All, réalisé en 2004. « Internet a sauvé ma carrière ! »
Jacques de Neuville

Discographie :
- Yuri Gagarin - XL817A
- Delta Kiss - XL817B
- Sunshine - XL817D
- Jackie Girl - XL817E
- My Favourite Part of You - XL817G
- Avec Dean BRODRICK : Jean Renoir - XL817C

En tant que compositeur/arrangeur/producteur :
- THE CLIENTELE : Strange Geometry - XC498D
- Laila AMEZIAN : Initial - UA4910
- Jonathan COE : 9th & 13th - XC559V
- Anthologies générales : Bellissimo ! - X 089H
- Anthologies générales : Dream Topping - X 234R
www.louisphilippe.co.uk
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