Michael Winterbottom
Michael Winterbottom
Sommaire
Sa vie
Voici un Britannique, né en 1961 d’une mère enseignante et d’un père employé chez Philips. Ce cinéphile précoce gavé de télévision étudie le cinéma à Bristol, après avoir obtenu une licence de lettres à Oxford.
Il continue son chemin par la case télévision comme monteur pour des téléfilms, puis devient cinéaste « de documentaires » et signe deux portraits d’ Ingmar Bergman. Il est par la suite engagé comme réalisateur sur des téléfilms aux sujets variés et aux conditions de tournage parfois échevelées.
Il se fait remarquer en 1994 avec un feuilleton en quatre épisodes sur une famille de Dublin (Family), feuilleton avec lequel il gagne plusieurs prix.
Avec son associé Andrew Eaton, il monte alors la société de production Revolution Film – un nom ni anodin ni innocent – et, un an plus tard, il sort son premier long métrage de cinéma (1) : l’étrange et déjanté Butterfly Kiss, road movie magnifiquement porté par ses deux interprètes, Amanda Plummer – la cinglée – et Saskia Reeves – la coincée. Nous sommes en 1995 et, cette année-là toujours, il propose à la BBC Go Now, film douloureux dans lequel un ancien footballeur, Robert Carlyle, est atteint de la sclérose en plaques.
La suite ci-dessous, à travers ses films commentés.
Son œuvre
Nous vous présentons ici une filmographie exhaustive (nous l’espérons) et chronologique (source : www.imdb.com) en n’y commentant que les films présents à la Médiathèque.
- Rosie the Great (1989) – TV
- Forget About Me (1990) – TV
- Alleyn Mysteries (1990) – Série télévisée
- The Magic Lantern (1990) – Documentaire
- Ingmar Bergman : The Director (1991) – Documentaire
- Time Riders (1991) – Série télévisée
- Boon (1991) – Série télévisée
- Under the Sun (1992)
- Love Lies Bleeding (1993) – TV
- Crackers (1993) – Série télévisée
- Family (1994) – TV
- Butterfly Kiss (1995)
- Go Now (1995) – TV
- Cinema Europe : The Other Hollywood (1996) – TV
Un drame dans l’Angleterre de la fin du XIXe siècle ; une adaptation du roman de Thomas Hardy Jude l’obscur. Une œuvre très aboutie du cinéaste qui dépeint les tentatives d’ascension sociale d’un homme, le tourment d’un amour désapprouvé par la société et la décision terrible d’un enfant. Âpre et noir. Magistral.
Fiche media: VB2969 Fiche media: VB2976
Un correspondant de guerre britannique de retour en Bosnie avec son équipe : la productrice et le caméraman. Dans le Sarajevo assiégé de 1991, il retrouve d’autres confrères ; croise le regard d’une pensionnaire d’un orphelinat sans ressources et perpétuellement bombardé ; se désespère de voir ses reportages supplantés au journal télévisé par des nouvelles bien futiles. Le tournage s’est déroulé en quelques semaines en Bosnie, Croatie et Macédoine au cours de l’été 1996 (après les accords de Dayton). Le scénario est inspiré de l’histoire réelle d’un journaliste d’ITN. Une réflexion intelligente sur le journalisme en temps de guerre et des images - d’archives celles-là - qui explosent au visage car elles semblent venir d’un autre temps, d’un temps où « on ne se savait pas », celles de la découverte des camps de concentration de l’Allemagne nazie. Mais non, elles datent des années 90 et on savait…
Une cité au bord de l’eau, des êtres à l’enveloppe trop étroite pour leur difficulté d’être mais qui essaient de composer avec l’existence. Elle en chantant et en offrant son corps, pour l’amour ou pour la tendresse, son jeune frère qui ne parle plus depuis le suicide de leur mère mais qui capte le son des autres, cet autre qui revient dans la ville, attiré encore et toujours par une superbe qui ne se donne plus qu’avec parcimonie. Et cette superbe, cheveux noirs, yeux de chat, tant désirée, ne parvient pas à échapper à l’emprise de la répétition. Un film aux couleurs fortes - les filtres utilisés subliment la côte anglaise - et à la bande - son prégnante. Musique et chansons sont très présentes, la première est d’ Adrian Johnston et les secondes du groupe Rare.
Trois sœurs, trois vies : Nadia, célibataire, cherche un compagnon au travers des petites annonces ; Molly, sur le point d’accoucher, prépare l’arrivée du bébé avec son mari ; Debbie, divorcée, semble plus à l’aise avec ses amants qu’à élever son jeune fils. Trois sœurs et leurs parents qui ne s’aiment plus. Et Alice dans tout cela ?
Au-delà d’une chronique de famille, le temps d’un week-end, Wonderland est une véritable fresque vivante composée de passants anonymes, Londoniens solitaires ou non, qui animent les rues. Michael Winterbottom retrouve ici ses marques en tant que documentariste et c’est caméra à l’épaule qu’il nous offre un recueil de petites scènes de la vie quotidienne - de vies pas toujours très reluisantes - avec ses problèmes de couples, ses problèmes d’argent, ses problèmes familiaux, des gens qui s’aiment, qui se haïssent, qui courent, qui ralentissent, les difficultés à élever un enfant, à trouver un compagnon, à le garder, à vieillir, à supporter le chien du voisin,… à assumer chaque jour.
Un film prenant, très sombre, social et très beau.
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Rosie et Vincent sont en couple depuis dix ans et mariés depuis cinq. Ils s’aiment et il ne leur reste plus qu’à faire un enfant. Mais tout n’est pas toujours aussi facile qu’on le croit. Ovulation, fécondation, insémination… Un chemin banal qui génère une grande tension pour ce couple pour qui faire l’amour devient programmé. Et puis, il y a Benoît, un Français un peu pataud, ancien amoureux par correspondance de Rosie, qui débarque en Angleterre pour lui rendre une petite visite… et ce n’est pas le meilleur moment.
Un film sans grande prétention, si ce n’est celle de raconter de façon très tendre et teintée d’humour l’histoire d’un couple qui désire avoir un enfant. La reprise par Yvan Attal de la chanson de U2 qui donne son titre au film ne manque pas de surprendre.
Kingdom Come est une ville perdue dans les neiges de la Sierra Nevada dans la seconde moitié du XIXe siècle. Un lieu dirigé, possédé même, par Daniel Dillon, homme puissant dont la fortune vient de l’or (2). Un jour, la diligence dépose un géomètre - qui doit étudier le tracé destiné au chemin de fer - et deux femmes inconnues… Une belle reconstitution d’une Californie sans plage ni soleil et une interprétation sans faille pour ce film rigoureux et sombre qui mêle réalisme historique et tragédie personnelle. Une magnifique histoire et un grand sens moral.
Le parcours plus que géographique de deux Afghans vivant dans un camp de réfugiés au Pakistan et qui cherchent à rejoindre la Grande-Bretagne. Michael Winterbottom réalise ici un film d’une grande portée réussissant à mêler fiction et documentaire sans que l’un n’entrave l’autre. La voix off décrit en quelques phrases la situation des personnes cherchant par de multiples moyens à rejoindre un pays d’Europe qui leur permettra une survie moins misérable ; les images nous mènent à voir et à effleurer (on ne peut sincèrement espérer plus) ce que traversent ces personnes, à travers la trajectoire fluctuante des deux hommes. Peu de mots, de l’intelligence, de la sensibilité et une magnifique utilisation du cinéma pour nous amener à réfléchir autant qu’à ressentir.
Le DVD contient deux entretiens: l’un avec le scénariste, l’autre avec le président de la Ligue des Droits de l’Homme en Belgique. Les deux interventions sont intéressantes.
Le futur. William est envoyé pour vingt-quatre heures à Shanghai afin d’élucider une affaire de trafic de « papeles », des laissez-passer très convoités car indispensables pour franchir les frontières.
William a un don, celui de l’intuition, qui plus est renforcé pour l’occasion par un virus d’empathie, ce qui lui permet de facilement entrer en contact avec les gens et de retrouver la coupable, Maria, jeune femme pulpeuse et rêveuse. Mais sans très bien savoir pourquoi, William dénonce une autre personne et laisse Maria continuer son petit trafic.
Le ‘sans savoir pourquoi’ est de toute évidence l’amour. William et Maria se retrouvent à la sortie de l’usine, et vont tout droit vers le «code 46», une loi qui interdit à deux êtres à corrélation génétique trop élevée de procréer.
Unique tentative - à ce jour - de Michael Winterbottom dans la science-fiction et, plus précisément, l’anticipation. Code 46 est surtout un film d’amour, registre familier à Winterbottom. Un film tout en atmosphère, entre Bienvenue à Gattaca (VB2978) et Lost in Translation (VL5931) ; atmosphère de couple, de déserts, de futur. La bande-son, signée Free Association, complète magnifiquement ce tableau.
9 Songs (2004)
A Cock and Bull Story (aka (3) Tristram Shandy : A Cock and Bull Story) (2005)
The Road to Guantanamo (2006) – TV – Documentaire
Sortie en salles à Bruxelles le 7 juin 2006
Murder in Samarkand (2007)
Film annoncé – N’ayons crainte de regarder l’avenir...
Mais encore…
Certes, nous n’avons pas rencontré ce cinéaste mais, au vu de sa filmographie, de son éclectisme – tant dans les sujets que dans les formes cinématographiques ou les médiums utilisés -, de ses choix… nous n’avons crainte d’affirmer que c’est une personne épatante, qui cherche à témoigner du monde qui l’entoure en plaçant toujours la personne humaine au centre de ses préoccupations, avec sensibilité et non sentimentalisme. Cela vaut aussi bien pour In This World que pour 24 Hour Party People, deux films aux sujets très éloignés l’un de l’autre.
Alors, oui, ceci est une invitation sans détour à rencontrer un bel univers.
BS / EV
1. Bien qu’il semblerait que son premier long métrage sorti en salles soit Under the Sun (1992), les biographes ne sont pas tous d’accord.
3. aka = also known as = également connu comme (un nom / un titre)