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Îles (3) : La plage

"Long Island: an interpretive cartograph" - Richard Scarry, 1947
Tout au long de l'été, chaque vendredi – jour de la semaine pas du tout choisi au hasard ; hommage à Daniel Defoe et tous les Robinson –, PointCulture vous emmène en expédition littéraire, musicale et cinématographique sur les îles. Cette semaine, nous nous promenons nonchalamment sur la plage, accompagné par le son du ressac et d'une guitare hawaïenne dans le lointain. Nous ne sommes pas seul et nous rencontrons, au gré de notre médiagraphie, Tilda Swinton, Takeshi Kitano et les Beach Boys, bien évidemment.

Sommaire

The Beach - Danny Boyle (2000)

Backpacker américain en vacances en Thaïlande, Richard (Leonardo Di Caprio) rencontre, dans son hôtel de Khaosan Road, Daffy, un Anglais devenu fou, qui se suicide peu après, non sans avoir légué une carte situant une île paradisiaque où vit une communauté autosuffisante et en communion avec la nature. Avide d’expériences en marge des circuits touristiques, il convainc un couple de Français, Étienne (Guillaume Canet) et Françoise (Virginie Ledoyen), de l’accompagner. Après une traversée à la nage et quelques péripéties, ils arrivent sur une magnifique plage, qui sera au centre de leur vie dans les semaines et mois qui viennent. Ils y rencontrent d’autres jeunes qui vivent en harmonie, plus ou moins guidés par Sal (Tilda Swinton). Mais le paradis cache des secrets, et le séjour se transforme en enfer.

Adapté d’un roman du même nom écrit par Alex Garland, The Beach a été réalisé par Danny Boyle en 2000, à une époque où les backpackers envahissaient l’Inde et l’Asie du Sud-Est, à la recherche de sensations fortes et de Full Moon Parties. Le film est marqué par l’époque, le spectateur remarquera que l’internet n’est pas omniprésent comme aujourd’hui, et que les téléphones portables sont inexistants. Le bien le plus précieux de l’époque, ce sont des piles AA pour faire fonctionner une Game Boy ! Les paysages sont spectaculaires et mis en valeur par une magnifique cinématographie, mais l’adaptation du livre est confuse et quelque peu superficielle. (ASDS)

Les Bahamas – Goombay et Joseph Spence

Aujourd’hui connu essentiellement pour le tourisme et la finance, l’archipel des Bahamas a connu une histoire mouvementée depuis son invasion par les Espagnols en 1492. Les différentes cultures qui se sont succédé dans l’archipel ont produit des formes artistiques et musicales hybrides. Plusieurs styles typiques y sont nés comme le goombay, ou les chants religieux des pêcheurs d’éponges. Le goombay est une rencontre entre la chanson britannique et la musique afro-caribéenne. Il était à l’origine joué sur des percussions bricolées, une barrique pour tambour, une scie et un tournevis comme grattoir (imitant le guïro cubain) donnant au genre son autre nom de « rake & scrape », gratter et racler. Le style s’est enrichi par la suite de divers instruments pour devenir un genre exotique florissant, qui a connu son âge d’or dans les années 1960 et était joué autant dans les hôtels pour touristes que dans les bals locaux.

Un autre style typique des Bahamas trouve son origine dans la seule activité économique de l’île autrefois, en dehors du tourisme : la pêche à l’éponge. La population pauvre de la région, qui vivait de cette industrie, a développé une culture musicale propre, faite d’un mélange de chants religieux et de chants de travail, entonnés en mer par les marins et à terre par les femmes qui nettoyaient et préparaient les éponges pour l’exportation. Un air typique de ce style est le morceau « Sloop John B. » repris par la suite par plusieurs artistes américains, comme le Kingston Trio, Jimmie Rodgers ou les Beach Boys. C’est dans ce milieu qu’est né le musicien Joseph Spence en 1910, sur l’île d’Andros. Il deviendra un guitariste virtuose et inspirera plusieurs générations de musiciens, dans l’archipel comme dans le reste du monde. (BD)

Retrouvez la musique des Bahamas sur mondorama:

Waikiki Stone-Wall Boys: On the Beach at Waikiki (1928)

La plage de Waikiki est probablement une des plus connues du monde. Quartier d’Honolulu, sur l’île d’Oahu à Hawaï, c’est aujourd’hui un lieu hautement touristique, dominé par les hôtels, mais les vagues y sont toujours aussi propices au surf, et les palmiers bruissent toujours au vent. Dans la première moitié du 20e siècle, cette plage paradisiaque était au cœur d’un nouveau mouvement musical qui déferlerait sur le monde entier. Il marie les sons de la steel guitar et des airs inspirés des îles. La chanson « On the Beach at Waikiki » est publiée pour la première fois en 1915 et a connu un immense succès lors de l’exposition universelle de San Francisco de la même année. Elle a été interprétée par divers artistes, parmi eux, on peut citer les Waikiki Stone-Wall Boys qui l’ont enregistrée en 1928. Ce groupe jouait très souvent dans la salle du même nom, dépendant de l’hôtel Moana à Waikiki. Le morceau a été repris par de nombreux artistes en version instrumentale ou chantée, de Felix Mendelssohn and his Hawaiian Serenaders à Tau Moe and his Original Hawaiians, des Kilima Hawaiians (un groupe hollandais) à Hank Snow. (ASDS)

Sur une plage imaginaire - Mike Cooper

Le guitariste d’origine britannique Mike Cooper est un rare exemple de musicien qui a su se renouveler radicalement. Après avoir joué un mélange de blues, de country, de jazz et de free jazz pendant près de trente ans et enregistré de nombreux disques au sein de formations diverses (la légende raconte qu’il a failli rejoindre les Rolling Stones mais a décliné l’invitation), il s’est construit une seconde carrière aux consonances lointaines, tirées de sa fascination pour les îles. Il a pour cela inventé, à l’âge de près de 60 ans, un style éminemment personnel qu’il nomme « ambient electronic exotica ».

Sa musique est un collage des notes qu’il tire de sa National Resophonic steel guitar, d’effets électroniques et de field-recordings réalisés au cours de ses nombreux voyages. Ceux-ci l’ont régulièrement amené à visiter des îles, principalement dans l’océan Indien et dans l’océan Pacifique. Ces rencontres avec Fiji, Tahiti, Hawaii, Borneo, Kiribati et ses séjours au Japon, en Nouvelle Zélande, en Thaïlande ou en Malaisie, l’ont conduit à s’intéresser aux différentes cultures de ces régions et notamment à la culture polynésienne. Sa vision des îles fait le lien entre cette étude de l’histoire et des musiques océaniennes et une vision plus onirique entrechoquant La Tempête de Shakespeare et les voyages de Thor Heyerdahl. Il s’est également penché sur la culture tiki et la musique exotica des années 1950 et a, par exemple, utilisé des samples d’Arthur Lyman dans son album Rayon Hula (2004).

Sa discographie est impressionnante et la plupart de ses albums font référence, d’une manière ou d'une autre, à l’univers des îles. Cela peut prendre la forme d’une référence, oblique ou directe, dans les titres, dans l’imagerie, ou dans les films qui les accompagnent – et qu’il tourne souvent lui-même – ou se refléter dans la musique elle-même. Si les références sont souvent brouillées, ou associent plusieurs inspirations distinctes, le résultat n’en est que plus évocateur, produisant un effet avant tout sensoriel, noyé dans un paysage sonore de plages lointaines et de forêts tropicales, de guitare hawaïenne et de gamelan artificiel. (BD)

À lire, une interview de Mike Cooper sur bandcamp.

Hell in the Pacific – John Boorman (USA – 1968)

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Au cours de la Seconde Guerre mondiale, un militaire japonais (Toshirô Mifune) survit sur une île déserte du Pacifique. Il a choisi pour abri une grotte jouxtant une plage blonde bordée de cocotiers, entre le rivage et la forêt tropicale. Tandis qu’il guette l’océan aux jumelles dans l’espoir d’y apercevoir un navire, son regard croise un bout de toile attestant d’une autre présence humaine. Sur la défensive, il va rageusement s’emparer de l’objet, un canot de sauvetage américain, puis part à la recherche de cet ennemi. Soudain traqué, le soldat américain (Lee Marvin), réfugié dans la végétation dense et infestée de moustiques découvre alors, lui aussi, qu’il n’est pas seul. Leur première confrontation se déroule sur cette plage, siège principal de la première partie du film. Deux visions – seules concessions à la violence physique – simulent un affrontement physique, qui conduirait de manière certaine l’un des deux protagonistes à la mort. D’instinct, les deux hommes se retiennent.

Très vite, la conquête de la plage se révèle indispensable : plus viable que la forêt, elle abrite aussi le réceptacle pour eau de pluie qu’a confectionné le Japonais. Elle donne accès à la mer dans laquelle se trouve la nourriture la plus accessible et compte une grotte qui permet de se protéger des intempéries. Dès lors, tout sera bon pour se l’approprier : ruses, guerre des nerfs, captures et humiliations… Jusqu’à ce que les deux hommes comprennent qu’ils ont besoin l’un de l’autre et que seule la coopération leur assurera une chance de survivre. Le tournage a eu lieu dans l’océan Pacifique, sur une des îles de la République des Palaos, en Micronésie. (NR)

à lire : https://www.critikat.com/actualite-cine/critique/duel-dans-le-pacifique/

Les Feux de la mer (France – 1948 – 21 min) de Jean Epstein

Feux_de_la_mer_01.png

Si la plupart des phares sont côtiers, celui de la Jument, situé non loin de l’île de Ouessant (mer d’Iroise, Bretagne), fut érigé sur une roche, comme d’autres phares en mer ceinturant l’île. Nul grain de sable alentour ; la construction occupe toute la surface du rocher. Tous ceux qui veulent y accéder doivent grimper à une échelle ou, par temps fort, se faire treuiller pour atteindre la plateforme.

C’est dans ce décor particulièrement difficile et exigu que Jean Epstein a posé sa caméra. Le scénario « fictionnel » de ce film documentaire de commande est simple : un gardien encore novice est nommé au phare de la Jument et remplace le vieux gardien, qui lui fait découvrir ce que sera son quotidien. La venue d’un ingénieur (inspecteur des phares) donne bientôt l’opportunité au cinéaste d’exposer de manière didactique la nécessité de ces œuvres de sauvegarde, partout dans le monde.

Feux_de_la_mer_05.png

« Tous ces phares et feux secondaires parlent une même langue : celle des éclats de lumière que tous les navigateurs du monde comprennent. »

Réalisé à la demande du Conseil du cinéma des Nations Unies, le film se veut un éloge de ces sentinelles de la mer qui ont mis leur savoir, leur courage et leurs constructions (côtières ou non) au service des marins et des voyageurs, et veillent à leur survie dans les moments difficiles, partout dans le monde (l’entraide et la solidarité entre les peuples) : l’évolution technologique des phares et balises et de la navigation (puissances lumineuses, signaux radio, radars, ballons météorologiques, etc.) donne lieu à quelques trouvailles filmiques (à la limite de l’abstraction) auxquelles le cinéaste oppose des images d’une mer compliquée.

Puis, Jean Epstein revient à la Jument et au mode fictionnel pour se livrer à une envolée poétique – dont il est coutumier – sur la solitude des gardiens de phare et leur « sacerdoce ». La nuit venue, la tempête rugit. Une voix – celle du doute, qui éprouve les nerfs et la détermination – chuchote à l’oreille du novice que certains phares ont brûlé par gros temps de suroît. Se pourrait-il que la base du phare de la Jument soit endommagée par les lames d’une mer déchaînée ?... La tour penche-t-elle ?... Le novice tiendra-t-il le coup jusqu’au retour au calme ?... Et une fois la tempête passée, abandonnera-t-il son rôle de gardien et son îlot de béton ? (MR)

Feux_de_la_mer_02.png

Note : le phare de la Jument est devenu célèbre grâce à une série de clichés du photographe Jean Guichard (1989) ; on y voit le phare dans la tempête, balayé par une vague déferlante et, en tout petit, son gardien sur le pas de la porte, Théodore Malgorn… un descendant ou parent du vieux gardien « Malgorn » présent dans le film de Jean Epstein. Le site officiel de Jean Guichard.

Sous le sable - Camille

Créons, inventons, chantons ! Si chacun pouvait essayer d’inventer sa petite musique, accéder à ce qu’il a en lui, à l’intérieur, le monde serait forcément plus doux. — Camille

Qu’y a-t-il sous le sable ? Qu’est-ce qu’on y voit ?

On y voit des vers de vase, enfouis, vivants, victimes de vos actes vils : violer l’espace vital pour vos futiles forts, vite avalés sous le flux variant des marées.

Qu’y a-t-il sous le sable ? Qu’est-ce qu’on y entend ?

Quand le clic-clac, l’article d’Ikea, craque, les clavicules collées aux galets, écoutez les coquilles, squelettes des mollusques, qu’on brusque, qu’on casse, et le lointain cliquetis des cônes et coques englouties qu’elles calquent.

Qu’y a-t-il sous le sable ? Qu’est-ce qu’on y sent ?

On n’y sent pas trop longtemps, on renifle et on comprend. Cigarette, urine, bitume, tout ce qui salit et qu’on hume. Sous la plage, les pavés. Sous le sable, on préfère rêver.

Mes îles font tourner la plage. Celles de Camille jouent avec les consonances, les évocations, les sons et autres allitérations. Minimaliste, sans prétention, une musique qui sourd de l’intérieur, nette et claire comme l’eau du ciel. Des paroles acrobates et le sable pour s’y recevoir en cas de… chut !

Qu’y a-t-il sous le sable ? L’or enseveli ?

L’île est là. Allez-y… (DM)

Sous le sable - Camille

Sous le soleil il y a les cieux
Et sous les cieux il y a les cils
Sous les cils il y a les yeux
Et sous les yeux il y a une île
Et sous l’île il y a le bleu
Et sous le bleu alors ? alors ?
Sous le bleu L. A. U. R. E
Sous le bleu il y a l’aurore

Sous le sable enseveli
Sous le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
… le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
Sous le sable enseveli l’or

Sous l’aurore il y a l’aura
Et sous l’aura il y a il et elle
Sous il et elle il y a la lune
Et sous la lune il y a le miel
Sous le miel il y a un lit
Et sous le lit il y a le ciel
Sus le ciel alors ? alors ?
Sous le ciel est là où elle dort

Sous le sable enseveli
Sous le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
… le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
Sous le sable enseveli l’or

Sous le ciel il y a l’orage
Et sous l’orage il y a les amants
Sous les amants il y a le large
Et sous le large il y a l’océan
Sous l’océan il y a les larmes
Et sous les larmes il y a le sang
Sous le sang alors ? alors ?
Sous le sang il y a les vagues
Sous les vagues il y a le vent
Sous le vent il y a le sable
Sous le sable alors ? alors ?
Sous le sable le sable mouvant

Sous le sable enseveli
Sous le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
… le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
Sous le sable enseveli l’or

Sous le sable enseveli
Sous le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
… le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
Sous le sable enseveli l’or

Sous le soleil il y a les cieux
Et sous les cieux il y a les cils
Sous les cils il y a les yeux
Et sous les yeux il y a une île
Et sous l’île il y a le bleu
Et sous le bleu alors ? alors ?
Sous le bleu L. A. U. R. E
Sous le bleu il y a l’aurore

Sous le sable enseveli
Sous le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
… le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
Sous le sable enseveli l’or

Sous l’aurore il y a l’aura
Et sous l’aura il y a il et elle
Sous il et elle il y a la lune
Et sous la lune il y a le miel
Sous le miel il y a un lit
Et sous le lit il y a le ciel
Sus le ciel alors ? alors ?
Sous le ciel est là où elle dort

Sous le sable enseveli
Sous le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
… le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
Sous le sable enseveli l’or

Sous le ciel il y a l’orage
Et sous l’orage il y a les amants
Sous les amants il y a le large
Et sous le large il y a l’océan
Sous l’océan il y a les larmes
Et sous les larmes il y a le sang
Sous le sang alors ? alors ?
Sous le sang il y a les vagues
Sous les vagues il y a le vent
Sous le vent il y a le sable
Sous le sable alors ? alors ?
Sous le sable le sable mouvant

Sous le sable enseveli
Sous le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
… le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
Sous le sable enseveli l’or

Sous le sable enseveli
Sous le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
… le sable enseveli l’or
Enseveli sous
L’or enseveli sous le sable
Enseveli
Sous le sable enseveli l’or

Sonatine - Takeshi Kitano (Japon - 1993)

affiche-sonatine.jpg

Takeshi Kitano raconte ici une histoire étrange de gangsters à la plage. Il y interprète le rôle de Murakawa, un yakuza de Tokyo envoyé par son patron sur l’île d’Okinawa pour prêter main forte à un clan ami aux prises avec un groupe rival. Dès son arrivée, lui et ses hommes tombent dans un piège et l’équipe est décimée par un attentat. Murakawa décide de se réfugier avec les survivants dans une maison au bord de la mer, en attendant que les choses se tassent. Les gangsters vont alors passer leurs journées à la plage, s’inventant chaque jour de nouveaux jeux.

Le film est en décalage avec les films de yakuzas classiques. Si la base, guerre de clans, crimes et code d’honneur, est respectée, la majorité du film tourne autour de ces moments de détente et de liberté qu’improvisent les hommes. Loin de leur territoire, et de la pression hiérarchique de la mafia japonaise, ils se lancent dans des improvisations de théâtre traditionnel, des matches de sumo, des concours de frisbee, ils bricolent des feux d’artifice. Ces scènes sont paisibles et presque contemplative, en contraste total avec les irruptions de violence extrême qui les entourent. Car la situation est bien claire, ces moments ne sont que des parenthèses dans la tragédie qui les attend. Un des jeux inventé par Murakawa est une partie de roulette russe, qui figure la fragilité de leur existence et la menace constante d’une mort absurde.

Le film a connu au Japon un échec commercial retentissant. Bien que ce soit déjà son quatrième film – et sa troisième histoire de yakuza – Takeshi Kitano restait connu auprès du public comme un comique de télévision. Ce virage vers un cinéma sérieux et violent, et son jeu minimaliste, était difficile à accepter pour ses anciens fans. Le public occidental, qui le découvrait lui en premier lieu à travers ses longs métrages, sera plus accueillant et soutiendra sa carrière cinématographique. (BD)


Mémoires de nos Pères (Flags of Our Fathers) de Clint Eastwood (USA-2006)

Premier volet « américain » d’un diptyque cinématographique sur la guerre du Pacifique et le théâtre d’opération d’Iwo Jima, Mémoires de nos Pères est l’adaptation d’un livre de James Bradley et Ron Powers : Flags of Our Fathers. Le film, suit en parallèle le parcours de trois des figurants d’un célèbre cliché – des Marines plantent un drapeau sur le mont Suribachi - devenu « viral » dans la presse étasunienne, l’assaut proprement dit des forces Américaines sur l’île et sa très coûteuse conquête en février/mars 1945, et enfin, il revient sur l’ambivalence fondamentale et déstabilisante du statut de héros. Dans le déroulement de la guerre, Iwo Jima est le premier bout de terre japonaise (dans les faits, un ilot volcanique sur lequel a été construite une piste aérienne) attaqué directement par les Alliés en raison de son emplacement stratégique majeur : il place l’archipel nippon dans le rayon d’action des forteresses volantes B29 qui vont bientôt déverser un tapis de bombes sur les principales infrastructures et villes japonaises. Isolés et sans aucun espoir d’être secourus, résolus de se battre jusqu’à la mort, les défenseurs japonais ont transformé ce « tas de poussières brûlantes où " presque rien ne pousse » en une termitière truffée de pièges invisibles et mortels. Outre les combats parmi les plus disputés du second conflit mondial (alors que la guerre est perdue) bien rendus dans le film, Eastwood revient sur le destin de héros vedettes, « forcés » de partir en tournée de propagande au pays - à la récolte de bons de guerre – dans la peau d’un « autre » (certains ne figuraient pas sur le fameux cliché et vivront avec ce malaise toute leur vie), otages d’un imbroglio administratif et militaire bien peu soucieux de vérité historique et de respect pour ses propres combattants. Et le cinéaste de nous donner sa propre définition du héros, de ce soldat qui se sacrifie non pas pour la gloire personnelle ou celle de son pays mais bien pour sauver la peau des hommes/compagnons qui se sont battus à ses côtés. (YH)



Lettres d'Iwo Jima (Letters from Iwo Jima) de Clint Eastwood (USA, 2006)



Intimement lié au film précédent, Lettres d'Iwo Jima est en quelque sorte la bataille d’Iwo Jima vue côté japonais, les « perdants sacrifiés ». Et le cinéaste de rendre hommage au courage de ces combattants oubliés en ouvrant son film sur la découverte de centaines de lettres jamais envoyées par les défenseurs de l’île vers leurs destinataires, et qui racontent leur vie ordinaire de soldat et leur sacrifice. Le film, tourné avec une image quasi sépia aux couleurs usées, fait un louable effort pour dépendre des soldats nippons par-delà les clichés habituels de guerriers fanatisés donnant leur vie pour l’empereur Hirohito, chargeant la baïonnette au canon en hurlant « Banzai ! », et même s’il tend parfois à faire « sur-jouer » ses personnages. Et Clint Eastwood de se pencher plus particulièrement sur les destinées tragiques de trois d’entre eux. Choisi pour commander ce dernier verrou du dispositif d’îles fortifiés de l’océan Pacifique protégeant le Japon face au grignotage progressif de l’immense armada navale US, le général Kuribayashi apprend dès son arrivée qu’il ne pourra ni compter sur l’aide de la flotte (en grande partie détruite dans les Philippines) et de l’aviation (il doit même renvoyer au pays les quelques appareils présents sur l’île). Loin d’être un fanatique et parfaitement conscient de l’immensité des moyens humains et matériels dont dispose un adversaire qu’il connait bien (il a passé du temps aux États-Unis et parle anglais), l’officier supérieur prend une série de mesures qui déplaisent à ses propres subalternes- retrait des plages, transformation de l’île en une souricière infernale, évacuation des civils - qui vont prolonger la résistance obstinée (et sans espoir) de l’île sur une quarantaine de jours, et alourdir sensiblement des pertes américaines déjà conséquentes. Il a sous ses ordres un baron cavalier et ancienne figure olympique, Takeichi Nishi, qui choisit « par honneur » de donner sa vie en combattant. Il est présenté dans le film comme attentif aux souffrances de ses soldats et même à celles des prisonniers adverses, offre un portrait inhabituel du militaire nippon. Tout comme le simple troupier Shimizu, dans le civil un boulanger un peu maladroit et pas vraiment batailleur, mais désireux de survivre à tous prix afin de voir enfin sa petite fille qui vient de naître, mais qui va montrer un étonnant courage dans une situation inattendue. (YH)



The Pacific (L’Enfer du Pacifique).série de Timothy Van Patten - David Nutter - Jeremy Podeswa - Graham Yost (USA, 2010)



The Pacific est une mini-série de 10 épisodes d’une heure chacun , inspirée de deux livres écrits par des vétérans de la guerre du Pacifique, et à la Manière de l’autre série « deuxième guerre mondiale » signée, HBO Band of Brothers, qui retrace en parallèle les les parcours d’une poignée de Marines, depuis leur engagement le lendemain de l’attaque de Pearl Harbour par les Japonais, jusqu’à leur retour dans leur foyer – à l’exception de ceux, tel John Basilone, tué au combat - fin 1945.Avec un réalisme de reconstitution minutieux et ébouriffant dans les scènes de combat, la série suit les grandes étapes de ce que fut la guerre du Pacifique côté américain, une progression à coup de sauts de puce mortels qui rapprochèrent des forces U.S. de plus en plus écrasantes, d’un archipel nippon défendu avec l’énergie du désespoirs par des soldats Japonais en infériorité matérielle et numériques. C’est aussi une histoire d’innocence perdue et de projets d’avenir hypothéqué, qui « s’offrent » à ces jeunes soldats inexpérimentés, qui peu à peu, s’endurcissent et deviennent de véritables machines de guerre, survivant aux multiples batailles meurtrières qui portent les doux noms de Guadalcanal, Peleliu, Okinawa ou encore Iwo Jima. Autant de lieux paradisiaques de carte postale (sauf Iwo Jima), de plages au sable fin et de bout de palmeraies tropicales, transformées en sourcières fortifiés de la mort par des soldats qui ignorent tout du mot reddition. (YH)


Une médiagraphie de l'équipe rédactionnelle de PointCulture : Anne-Sophie De Sutter, Philippe Delvosalle, Benoit Deuxant, Daniel Mousquet, Marc Roesems et Nathalie Ronvaux.

Un feuilleton estival en 8 épisodes

image de bannière : Long Island: an interpretive cartograph. Richard Scarry, 1947 - New York Public Library (domaine public)

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