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VANITAS
LEM
- Ref. NL2982
- SLOUCH HAT RECORDS, 2022.
Avec son troisième album, le trio belge LEM redescend sur Terre, troquant la verticalité cosmique de ses débuts contre une exploration de la Terre, de ses rues, ses plages, ses forêts, ses enfers. Observant ceux qui les habitent, chantant la nature - littéralement - morte et les vanités trop humaines, tels trois visiteurs de l'espace lançant un ultime regard en arrière, ils saluent l'océan, disent adieu à la Terre, à ses dieux amers, au jour et à la nuit. « La fin de la nuit, elle, ne viendra pas » (Humain ceci, plage 7)
Memento mori, cruel testament, Vanitas, paru sur le tout jeune label bruxellois Slouch Hat,contient 11 bombes sonores à l'attention des derniers hommes, comme autant de révélations sur lesquelles danser pendant que la maison brûle (« Devant toi la route crache son sang / Devines-tu au loin l'impasse, Vanitas ? », Vanitas, piste 5). Boites à rythmes sautillantes, basses bondissantes, synthétiseurs spatiaux et choeurs éthérés animent pourtant des mélodies entraînantes, filles d'Elli & Jacno, de Polyphonic Size, Telex ou Suicide. Nicolas Ekla les chante d'une voix haute, au maniérisme subtil, évoquant ci Dominique A (Je ne sais plus), là Christophe (Bombe Sonore), alternant parlé-chanté et fébrilité.
Depuis le lancement de son module lunaire en 2003 avec Bientôt le cosmos, le projet du chanteur et musicien belge (Les Brochettes, Ming) est passé du minimalisme électronique solitaire à une pop bien plus physique, animée, en même temps que le rejoignaient Wilf Plum (Dog Faced Hermans, Orchestre tout puissant Marcel Duchamp) à la basse, puis Flo Cha (Refurinn Kitsune) aux choeurs et claviers. Depuis le 2e album de LEM (Soulstreet, en 2009), le trio déploie son sens du rythme et des harmonies dans des concerts énergiques, emportant ses spectateurs dans des danses frénétiques.
Comme des modèles kraftwerkiens devenus chamanes, les trois membres de LEM conjuguent les grooves dub ou postpunk et les sonorités synthétiques les plus tranchantes pour animer la poésie noire de Nicolas Ekla. À la fois métaphoriques (« Chaque jour j'allumerai une cigarette noire
Chaque jour je mangerai mon pain noir / Chaque jour je sortirai mon étendard noir », Noir, piste 1) et revendicatifs (« On en trouve partout croyez pas / Que c'est un privilège de riche / Que d'être dieux dans son chez soi / Deux couilles et une niche », Les Dieux, piste 11), les textes de ses albums convoquent régulièrement de glorieuses figures tutélaires comme Fassbinder, Rimbaud ou Maiakovski.
Pour Vanitas, c'est l'ombre de Maldoror, le personnage mystérieux, nihiliste et misanthrope inventé par Isidore Ducasse, qui plane sur Noir ou Vieil Océan. Son « Je te salue vieil Océan » est au coeur de cet album de fins des temps, plus triste qu'amer, nourri autant de colère que d'amour. C'est ainsi que chacun pourra l'entendre un peu adressé à soi : « Que personne ne sorte / Le coupable est de la fête » (Pop is dead, piste 4). Mais rassurez-vous, si la pop est morte, Vanitas n'est pas son chant du cygne : LEM enregistre déjà de nouvelles chansons.
Wilfried Paris.
Interprètes
- Wilf PLUM : Basse
- Gabriel SEVERIN : Mixage, Mastering
- Flo CHA, : Chant, Claviers
- Nicolas DESCHUYTENEER (EKLA) : Chant, Sequencer
Pistes
- 1 Noir
- 2 Je ne sais plus
- 3 Vieil océan
- 4 Pop is Dead
- 5 Vanitas
- 6 Farouche
- 7 Humain ceci
- 8 Eurydice
- 9 À l'attention des visiteurs de l'espace
- 10 La bombe sonore
- 11 Les dieux