En avril 1978, le Sporting Club de Bastia affronte les Néérlandais du PSV Eindhoven au stade de Furiani, en match aller de la finale de la Coupe UEFA. Le président du club corse a l'idée de faire filmer l'événement. Et Gilbert Trigano ne confie pas cette mission au premier cameraman venu: il contacte ni plus ni moins que Jacques Tati, qui accepte la gageure.

Le cinéaste décide d'accorder autant d'importance à ce qui se passe hors du stade, avant le coup d'envoi et après le coup de sifflet final qu'au match lui-même. Toute la ville, voire toute l'île, semble gagnée par une fièvre footballistique. On a tricoté des chandails bleus et blancs aux chiens, les calicots pendent au-dessus des ruelles... Sans compter que peu avant l'heure H, des pluies torrentielles s'abattent sur Bastia et transforment l'aire de jeu en bourbier détrempé... Tati peut alors à loisir cadrer les mouvements des jardiniers qui s'emploient à désengorger le terrain puis ceux des vingt-deux joueurs comme un de ces ballets burlesques qu'il affectionne particulièrement.

Deux semaines après un 0-0 quasi logique sur ce terrain presque injouable, lors du match retour au Philips Stadion d'Eindhoven, le PSV écrase les Bastiais sur le score sans appel de 3-0. Mauvais perdant, le président du club corse perd dès lors sa motivation à voir le film se finaliser. Vingt ans plus tard, Sophie Tatischeff - la fille du cinéaste - monte les rushes d'un film réputé perdu retrouvés entre temps à la Cinémathèque régionale de Corse.