Des régions frontières emblématiques d'Europe, d'Asie, d'Afrique et des Amériques permettent d'étudier les discontinuités ou modes de jonction entre des espaces géographiques distincts, à différentes échelles, ainsi que leurs effets sur les populations, les modes de représentation de l'espace, les États... À travers le regard de ceux qui vivent au quotidien dans ces régions frontières, cette série fait découvrir les paysages, les mentalités, les enjeux économiques et politiques liés à la problématique des lignes de partage, imposées par la nature ou tracées artificiellement par les hommes.

Chaque jour, plus de 25.000 Malais traversent le détroit de Johor pour se rendre à Singapour, où les salaires sont beaucoup plus élevés. Il y a quelques années encore, cette frontière n'existait pas: au XIXème siècle, Singapour et la Malaisie appartenaient à un même ensemble, administré par la Couronne britannique. Singapour n'était qu'un petit îlot envahi par la forêt tropicale et occupé par les pêcheurs malais.

Grâce à sa position stratégique, au carrefour des routes maritimes entre Orient et Occident, le port de Singapour prospéra rapidement. Les Britanniques encouragèrent la venue de main-d'/uvre étrangère et en quelques décennies des centaines de milliers de Chinois s'installèrent sur l'îlot et devinrent vite majoritaires.

Lorsque le Royaume-Uni accorde l'indépendance à Singapour et à la Malaisie, les deux territoires, qui partagent une histoire commune, décident en 1963 de lier leur destin en une fédération. Mais, très vite tout bascule: dans les rues de Singapour, de violentes émeutes éclatent entre Chinois et Malais. Ces derniers, devenus minoritaires, ont été écartés du pouvoir politique et économique et s'en prennent aux intérêts chinois. A la suite de ces affrontements meurtriers et des troubles raciaux, la Malaisie décide de quitter la fédération. Le 9 août 1965, les Singapouriens apprennent par la radio qu'un nouvel état vient de naître: Singapour. Un état minuscule de 40 km de long sur 20 km de large où se concentrent quatre millions de personnes. Un des états les plus prospères de la planète qui doit beaucoup à sa main d'oeuvre docile et à son rang de place financière internationale où les capitaux circulent librement.

Mais pour la première fois depuis sa création, Singapour s'essouffle : crise financière, délocalisations,... l'âge d'or de la forte croissance est révolu. Les Malais de Johor doivent imaginer leur avenir sans Singapour, l'eau devient un enjeu politique entre les deux états et la Malaisie tente de concurrencer sa cité voisine.

Note: Cette émission fait l'objet d'une fiche pédagogique, réalisée par Anouck Durand, professeur d'histoire et de géographie, pour le Centre national de Documentation pédagogique (CNDP), en France, consultable en ligne à l'adresse : http://www.cndp.fr/tice/teledoc/Mire/mire_front-singapour.htm