Steve Reich est l'héritier du génie typiquement américain, le melting-pot, qui brasse les genres et les styles, et où s'illustrèrent ses augustes aînés, Charles Ives, George Gershwin ou Leonard Bernstein.

Eric Darmon et Franck Mallet l'ont suivi pendant deux ans, au Havre d'abord, où il était l'invité prestigieux du festival "Automne en Normandie" en 2007, puis à Rome et Tokyo en 2008. L'année suivante, ils l'ont rencontré à son domicile new-yorkais et assistaient à la création de "2X5" à Manchester. Le matériel recueilli pendant ces nombreuses rencontres se retrouve dans "Phase to face", un portrait dans lequel Steve Reich revient sur son parcours artistique.

Il nous parle tout d'abord de la révélation que fut pour l'adolescent qu'il était alors la découverte de Stravinski, Bach et du "Be-bop" joué par Charlie Parker, Miles Davies et le batteur Kenny Clarke. Ses études de philosophie terminées, il s'inscrit à la Juilliard School of Music. Luciano Bério et John Coltrane le marqueront durablement pendant ses années de formation mais, amoureux du rythme sous toutes ses déclinaisons et ne reniant pas la tonalité, très souvent agacé aussi par le côté cérébral cultivé par d'aucuns, Steve Reich saura développer un langage en accord avec sa propre sensibilité. Il pose les bases du "Phasing" avec "It's Gonna Rain" composée en 1965. Les années suivantes l'imposeront comme un des fondateurs du minimalisme. Son imagination constamment en éveil, il souhaite explorer de nouvelles possibilités et réintroduit dès les années 80 le texte dans ses compositions: "Tehilim" est construit sur des textes hébraïques et "Different Trains", un quatuor à cordes et bande magnétique intègre le discours parlé. Les questions philosophiques et religieuses se font de plus en plus présentes et seront l'objet d'un opéra, "The Cave", écrit avec sa femme, la vidéaste Béryl Korot. Profondément humaniste, curieux de nature et doté d'un sens aigu de l'observation, Steve Reich a révolutionné le langage musical du XXe siècle.