Ce nouvel album d'Alog s'intitule "amateur", une position difficile à defendre lorsqu'on sait qu'il s'agit de leur quatrième album (cinquième si l'on compte la compilation d'inédits Catch that Totem!, sortie en 2005.) Si Espen Sommer Eide et Dag-Are Haugan ont choisi ce titre, ce n'est pas dans un grand souci de fausse modestie mais bien en faisant allusion au fait qu'ils avaient principalement utilisés pour ce disque des instruments dont aucun d'eux ne savait jouer. Reprenant à leur compte la théorie du non-musicien de Brian Eno, ils célèbrent la liberté et la fascination qu'on peut avoir pour un instrument de musique lorsqu'on l'aborde pour la première fois, comparées au souci de perfection technique quelquefois castrateur qui accompagne la spécialisation. " A proprement parlé, je suis un non-musicien " disait Brian Eno interwiewé par Lester Bangs en 1979, " aucune de mes aptitudes ne sont manuelles, elles n'ont rien à voir avec une quelconque manipulation, mais plutôt une sorte d'ingénuité. " Le duo norvégien à depuis ses débuts été fasciné par le son, par le " potentiel émotionnel du timbre ", une recherche dans laquelle la virtuosité instrumentale n'a que peu d'importance ni d'intérêt. Leurs compositions reflètent cette optique musicale, favorisant soit la construction en boucle, permettant l'éternel retour du son aimé, ou la construction en sons isolés, dissociés, qui permet de les mettre en valeur les uns après les autres. Des morceaux comme " sleeping instruments ", au volume sonore proche du silence, dans lequel on discerne néanmoins de légers sons minutieusement enregistrés, témoignent de la fascination d'Alog pour le son brut, presque pur, indépendamment de toute référence, y compris musicale. La pochette intérieure les montrent occupés à enregistrer un marteau et des clous, ce qui pourrait être un gag pour d'autre est chez eux un modus operandi, une méthode de travail qui les voit mettre sur un même pied les instruments et les objets. L'album contient à ce titre une large palette de sons, dont une grande partie est utilisée comme percussions. On y trouve aussi, et c'est une bonne nouvelle chez Alog, plusieurs pièces chantées, comme la fort réjouissante plage d'ouverture " Son Of King ", ou en tout cas contenant une proportion sérieuse de voix humaine, traitée ou non. Si l'album hésite quelquefois entre la contemplation du son et l'organisation musicale, il est néanmoins un excellent album de plus pour ce groupe, contenant de très grands moments quasiment pop. (bd)