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COCHIN MOON (REMASTERED)
Haruomi HOSONO & TADANORI YOKOO

  • Ref. XH797E
  • LIGHT IN THE ATTIC RECORDS COM, 2018. Enregistrement 1978.

A 70 ans, le pionnier du rock et de la pop synthétique, auteur du premier album de musiques de jeux vidéo au monde, est un géant dans son pays. Il était au Barbican de Londres, fin juin. Une incursion européenne, alors que le label américain Light in the Attic publie pour la première fois ses oeuvres en Occident. «Je suis connu ici pour ma musique techno. Mais maintenant, la musique que j'ai envie de jouer, c'est du boogie-woogie...» L'ironie n'a pas pu échapper aux hipsters venus se presser au Barbican de Londres en juin 2018. Pour son 16e anniversaire, le label américain Light in the Attic, spécialisé dans la réédition d'oeuvres obscures des années 60 à 90, invitait pour la première fois en Europe Haruomi Hosono pour un concert sous son nom. Hosono ? Rien de moins que «la figure la plus imposante de l'histoire de la musique japonaise moderne», selon le label, concepteur et fondateur du Yellow Magic Orchestra (YMO), pionnier de la pop synthétique et de l'ambient, auteur d'un des tout premiers disques électroniques au Japon, du premier album de musiques de jeux vidéo au monde !

Un géant longtemps méconnu en Occident, auteur de graals de la mélomanie dont les pressages vinyles originaux, manufacturés pour le marché japonais exclusivement, s'échangent à prix d'or depuis une dizaine d'années, notamment grâce aux blogs et forums qui ont commencé à en faire connaître les joyaux. Or, ce soir-là à Londres, «Harry» Hosono, 70 ans et tout à fait débonnaire, n'a fait (presque) aucun effort pour le public occidental - si ce n'est convier sur scène Ryuichi Sakamoto et Yukihiro Takahashi, ses compagnons au sein de YMO, en souvenir du bon vieux temps, quand le trio était un fleuron nippon au même titre que les Walkman ou les appareils photo. Avant ce finale émouvant, il a surtout joué la musique qu'il joue depuis une décennie et qu'on peut entendre sur des albums aux titres évocateurs (Vu Jà Dé, Flying Saucer 1947...), sur les pochettes desquels il pose en ojisan (grand-père) ironique, un béret de pépé vissé sur la tête. Pépite.

Devant un public composé pour un tiers d'expatriés japonais qui étaient sans doute les seuls à tout à fait comprendre de quoi il en retournait, le pionnier (re)devenu chansonnier s'est fait plaisir en jouant quasi exclusivement les standards qu'il a découverts à la radio enfant, en pleine occupation américaine. Et puis, pour donner le change malgré tout, il a repris une pépite de ses années synth-pop (Sports Men, enregistré en 1982) ainsi que Radioactivity de Kraftwerk en hommage anxieux aux victimes passées et futures de Fukushima. Les deux en version folk esthète, tels des standards parmi les autres. Ce jeu de genres en dit long sur la complexité du gargantua Haruomi Hosono, que la réédition groupée - étalée de juillet à septembre - de cinq albums parmi les plus emblématiques de son immense corpus expose de manière éblouissante. Le néophyte découvrira en effet au gré de ces disques originellement publiés entre 1973 et 1989 un cousin japonais de Bob Dylan, Brian Wilson, Phil Spector, Jean-Michel Jarre, Trevor Horn, Brian Eno et Aphex Twin. Sans forcer le trait. Sous son nom, en solo, en groupe, sous les spotlights ou dans l'ombre des rockeurs ou starlettes de télévision pour lesquels il a composé des tubes par dizaines, Hosono a traversé cinq décennies de musique populaire sans jamais cesser d'innover, d'inventer et de se réinventer. C'est Light in the Attic qui accomplit de nouveau le prodige de les éditer pour l'Europe et les Etats-Unis, quelques mois après Even a Tree Can Shed Tears, première compilation du genre consacrée à l'émergence du folk au Japon à la fin des années 60, où Hosono apparaissait deux fois, au sein du groupe Happy End et en solo. Et le moins que l'on puisse dire est que le spectre musical est immense. Hosono House, l'album le plus ancien (1973), présente un folk rock intime et exotique, enregistré au sein d'une communauté hippie mais largement en solitaire, et dont les arrangements cossus lorgnent autant du côté de Van Dyke Parks que de Stax ou Buffalo Springfield. Libéré de Happy End, Hosono y entamait une collaboration de longue date avec Tin Pan Alley, collectif de musiciens avec lequel il allait accompagner le gratin d'une pop japonaise adulte, urbaine et sophistiquée. Paraiso, paru à l'orée des années new wave, en 1978, concluait une trilogie consacrée à l'exotica dans une version inversée, dans laquelle Hosono reprenait avec subtilité les clichés de l'orientalisme américain d'après-guerre, porté par des musiciens comme Les Baxter ou Martin Denny, pour mieux les retourner.

Cochin Moon, paru la même année, est une folie électronique conçue au retour d'un voyage en Inde avec le plasticien pop Tadanori Yokoo, dont les refrains fiévreux d'un Bollywood rêvé et les blips des synthétiseurs simulent autant le futur que les bruits de ventre de deux Japonais en crise de tourista carabinée. Philharmony (1982), enregistré en solitaire entre deux tournées de YMO, est la pépite techno pop ultime, dans laquelle le génie pop devenu laborantin électronique fait feu de tous les genres, toutes les cultures, dans un grand carnaval robotique. Omni Sight Seeing (1989), enfin, est un rêve d'electronica mondialisée et absolument émancipée, qui se balade effectivement de la musique traditionnelle de Hokkkaido à Duke Ellington en passant par Tanger, sans jamais perdre de vue le devenir de l'art pop - cybernétique ou rien. Faste. Quelle ligne rouge unit les cinq disques, parus à des moments si différents des années de faste économique au Japon ? Outre la prescience formelle, constante et versatile, c'est précisément la voix du maître, qu'on reconnaît où qu'il rêve et quoi qu'il fasse, un riff nostalgique sur une guitare demi-caisse ou une séquence virtuose dans son échantillonneur. Car tout géant qu'il soit dans son pays depuis les années 70 et dans de plus en plus de coeurs de mélomanes dans le monde depuis quelques années, Hosono est surtout un créateur profondément fantasque et original, aux obsessions tenaces et à l'écriture hautement reconnaissable. D'une balade nostalgique à un exercice ambient, l'auditeur aura tout loisir, s'il a la chance de découvrir ces cinq merveilles ensemble, de relier les moments d'audace et les points de fixation comme autant d'indices d'un talent effectivement hors-norme, qui quitte enfin le bercail nippono-japonais pour passionner le monde entier. (Olivier Lamm dans Liberation.fr)

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Interprètes

Pistes

  • 1 Ground Floor... Triangle Circuit On The Sea-Forest
  • 2 Upper Floor... Moving Triangle
  • 3 Roof Garden... Revel Attack
  • 4 Hepatitis
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  • 6 Madam Consul General Of Madras