Pianiste et organiste entre 1973 et 1976 du séminal groupe glam rock anglais Mott The Hoople, Morgan Fisher a par la suite enregistré une série d'albums originaux et intéressants pour le label Cherry Red. L'un des plus atypiques reste cette compilation de faux groupes en provenance d'une obscure petite ville du nom de Peabody dans le Kansas. En ce sens, «Hybrid Kids, a collection of classic mutants» fut conçu en réaction à la recherche incessante des journalistes spécialisés de nouveaux courants musicaux issus de scènes encore méconnues du grand public. A l'époque de sa sortie, radios et journaux ont cru à cette imposture créé de toute pièce par Fisher et l'un des fondateurs de Cherry Red, Iain McNay. Le musicien chante, joue de la guitare, de la basse et des claviers tout en manipulant des bandes magnétiques à la manière de Steve Reich grâce à un simple enregistreur quatre pistes (payé vingt-cinq livres) installé dans son studio de Notting Hill. Fisher y revisite des classiques populaires en les confrontant à des univers diamétralement éloignés du leur. C'est ainsi que deux chansons des Sex Pistols se voient interprétées par Pinky et Perky (cousins anglais des Chipmunks) et le tube Eurovision «Save Your Kisses For Me» des dispensables Brotherhood of Man est relifté à la façon du groupe post-punk, Devo (avec boucles de yodel en prime). Autre haut fait d'arme la reprise façon Suicide du «You've Lost That Lovin' Feelin'» des Righteous Brothers ou encore la chanson «MacArthur Park» composée par Jimmy Webb pour Richard Harris se transformant en ska fiévreux façon 2-Tone. Croire pour autant que Morgan Fisher se veut juste irrévérencieux serait loin de la vérité, la reprise en forme d'hommage d'«Enlightment» de Sun Ra hérite d'un décorum assez similaire à l'original, les Stranglers sont affublés d'un son à la Residents, Kate Bush se prend pour Jah Wobble et le «Get Back» des Beatles devient presque naturellement un collage à la Eno/Byrne. Les angles de lecture sont variés et hyper référencés, Fisher bouscule et réinterprète les codes de la pop pour au final confectionner une musiques mutine et mutante de façon ludique et jouissive. (DM)