Plus que jamais le Focus Group reste fidèle à son goût pour la library music et la musique de film. Ce nouvel album, plus encore que ses prédécesseurs, semble avoir été conçu en cousant ensemble des fragments épars de documentaires psychédéliques, de giallo, de série B, de films d'entreprises, en en choisissant les passages soit les plus envolés, les plus lyriques, soit les plus inquiétants et les plus confus. Les morceaux sont courts, presqu'inachevés, passant de quelques secondes d'une ambiance à quelques secondes d'une autre, changeant perpétuellement de tonalité, de saveur. Mais Julian House (monsieur Focus Group, co-fondateur du label Ghost Box) double encore la mise en traitant la mécanique interne de ces fragments de la même manière, brisant les boucles, superposant les samples avec une incohérence sauvage, qu'on imagine volontaire. Le résultat est saoulant, désorientant, comme de chercher à suivre les caprices d'un enfant hyperkinétique armé de deux platines et d'une caisse de disques sans étiquettes. Le " karousel " du titre est sans doute la métaphore la plus appropriée, symbole de perte de contrôle, d'ivresse. Les éléments épars cherchant à constituer les morceaux de ce disque se pourchassent à toute vitesse sans parfois se rejoindre, ou au contraire en se dépassant comme dans une course poursuite, pour finir à des lieues les uns des autres dans le champ stéréophonique, ou dans la continuité chahutée, bouleversée, de l'album. " Elektrik Karousel " est le premier disque de Focus Group en solo depuis un certain temps. Ses prédécesseurs l'avait vu s'allier, presque jusqu'à la fusion, avec le groupe Broadcast, notamment pour l'excellent Broadcast and the Focus Group Investigate Witch Cults of the Radio Age. Les deux entités sont restées proches, malgré la mort de Trish Keenan en 2011, et ce nouvel album est crédité: "All titles composed by the Focus Group with help from Broadcast." (BD)