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Vinyles Folkways à PointCulture Liège et ULB-Ixelles

banniere 8 pochettes Folkways PointCulture
Tout cet été, deux dépôts de disques Folkways - mythique label américain de musiques populaires du monde entier, à la démarche et à la ligne graphique irréprochables - vous attendent à Liège et à l'ULB. Vous pouvez les écouter sur place ou les emprunter. Et plus d'un millier d'autres titres (LP ou CD) sont disponibles sur commande ! Un trésor !

Sommaire

Présentation, histoire et missions (par Étienne Bours)

[Chez Folkways, ] on ne faisait pas dans le tape à l'œil, on travaillait le fond, en dehors de tous les courants de mode, avec une simplicité et une efficacité rarement rencontrées sur le marché du disque. Une collection qui balisait les traditions américaines, noires et blanches, les racines profondes du blues et des folk songs, de la musique old time, bluegrass, cajun, tex-mex, du gospel, des spirituals et du jazz. Un stock inépuisable, inégalé, que venait doubler une collection consacrée aux musiques du monde : Afrique en tête sans doute, mais l'Europe, le sud du continent américain, l'Asie, l'Australie… y étaient très bien représentés.

Moses Asch - source website Folkways

Moses Asch - source website Folkways

L'homme qui avait imaginé et lancé cette aventure dès 1935 n’est autre que Moses Asch, un ingénieur électronicien qui fabriquait de l'équipement pour les stations de radio. Pour alimenter ces équipements, il a décidé d'enregistrer des musiques populaires, ‘parce que ça racontait une histoire, parce que ça documentait un sujet’. — Étienne Bours

Il avait la passion pour ce que véhiculait la musique bien plus que pour la musique elle-même. Il a donc tranquillement construit son affaire, produisant son premier disque en 1939, sur le label Asch. À force de prendre des risques pendant des temps extrêmement difficiles, il fera faillite en 1947 avec une de ses compagnies (Disc) et c'est à ce moment qu'il créera Folkways. Contre vents et marées, il luttera, véritable militant des musiques de tradition. Jamais, il n'est rentré de lui-même dans le système. On le regardait de haut, lui reprochant ses enregistrements trop "ethniques, trop primitifs". Ses disques connurent parfois un certain succès, notamment pendant le boom folk des années 1960. Paradoxalement, il était partiellement responsable de cet engouement nouveau, c'est lui (et Alan Lomax bien sûr) qui avait enregistré nombre de grands noms de la chanson folk des États-Unis : Pete Seeger, Woody Guthrie et Cisco Houston, notamment. Ces hommes étaient la source vers laquelle se tournaient les nouveaux venus, Bob Dylan en tête; ils étaient le lien entre les anciennes traditions rurales et les nouveaux mouvements intellectuels.

Asch n'en tira aucune gloire, il se contenta de continuer son business sans le changer d'un iota et contempla amèrement la façon dont une certaine variété allait récupérer le mouvement. Mais il continua jusqu'à sa mort dans les années 1980. La grande force de ce label était un principe auquel Asch tenait énormément: conserver l'entièreté des références au catalogue.

Whether it sells 8,000 copies each year or only one copy every five years, every Folkways title remains available for purchase. — site Folkways > Mission and History

Lorsqu'un disque était épuisé, soit on le repressait, soit on en vendait des copies cassettes à la demande [aujourd’hui des copies CD-R ou des fichiers numériques]. Cas rarissime, sinon unique en son genre. Ce catalogue entier de quelques 2000 titres fut entièrement racheté par la Smithsonian de Washington [la grande institution muséographique, pédagogique et de recherche officielle de l’État fédéral américain], après le décès de Moses Asch. Aujourd'hui, la politique de Smithsonian Folkways reste la même tout en reflétant les idées nouvelles [de celles et ceux qui en ont repris le flambeau].
(Étienne Bours, pendant de nombreuses années responsable des collections de Musiques du monde à La Médiathèque)

Folkways : la musique du Peuple, des peuples, forcément politique

Par ses sympathies idéologiques (Moses Asch est né dans une famille juive socialiste de Varsovie) mais aussi par son intérêt pour une musique (et ponctuellement aussi pour les mots sans musique, les discours, les témoignages, le spoken word) qui raconte le monde réel, les conditions de vie, le fondateur de Folkways a posé les bases d’un label engagé, progressiste, attentif à la cause des femmes, des Afro-Américains encore victimes de racisme et de ségrégation, aux conditions de vie des travailleurs, aux révoltes des peuples du monde vivant sous le joug colonial ou de la dictature.

En parcourant le catalogue Folkways, on rencontrera les noms des chanteurs engagés Woody Guthrie et Pete Seeger, tous deux membres du très à gauche American Folksong Movement, des syndicalistes Joe Hill et Eugene Debs (via un disque où le parcours politique de ce dernier est évoqué par le jeune Bernie Sanders), des Black Panthers Angela Davis et Huey P. Newton, etc.

Mais, au-delà de ces marqueurs très évidents d’un engagement politique clair, même des disques non immédiatement identifiés comme politiques mais enregistrés par des musiciens et musiciennes non-professionnels, autodidactes, issus de milieux ou de territoires jusque-là peu considérés témoignent d’une sorte de révolution copernicienne de la culture, enclenchée par les collecteurs de musiques comme Moses Asch ou John et Alan Lomax. Dans le documentaire de Rogier Kappers sur Alan Lomax, la pétillante ethnomusicologue nonagénaire Henrietta Yurchenco raconte :

[Lomax – et, personnellement on oserait ajouter Asch] a changé la conception que les Américains avaient de la société en marge de l'élite. Il y avait la classe cultivée avec ses livres et ses auteurs… Et la classe supérieure snob qui était convaincue que toute culture devait suivre un schéma particulier, leur schéma. Mais Alan fut réellement la personne qui a fait comprendre à toute la société américaine que les pauvres ont également une culture. Et bien plus encore, que cette culture est précieuse, aussi valable que toute autre culture. — Henrietta Yurchenko, ethnomusicologue

> Pour en savoir plus sur cet aspect social et politique, Bryan GARMAN : article “Folkways Records” sur encyclopedia.com et Rachel C. DONALDSON : “Teaching Democracy : Folkways Records and Cold War Education” in History of Education Quaterly (2015)

Une ligne graphique aussi simple qu’efficace

Il n’y a pas qu’en termes d’engagement social et politique que Folkways se profile selon une ligne claire et immédiatement identifiable, c’est aussi le cas de l’esthétique de ses pochettes. Avec son équipe visuelle (parmi laquelle on retrouve très souvent le graphiste Ronald Clyne et le photographe David Gahr), Moses Asch développe une proposition à la fois économe et particulièrement séduisante.

Dans la plupart des cas, la pochette consiste en une impression bichrome sur un papier de format proche de l’A3, collé sur l’avant et une partie seulement de l’arrière d’un emballage en gros carton noir générique. A partir de ce choix probablement économique et stratégique (acheter des pochettes génériques en grandes quantités pour toutes les sorties du label et imprimer leur couverture propre à part, en plus petite quantité et sans recours à une quadrichromie plus coûteuse), la créativité en terme de typographies, le sens des couleurs font de la plupart des pochettes Folkways de petits bijoux, qui septante ou cinquante plus tard on particulièrement bien passé l’épreuve du temps.

> Pour en savoir plus sur la ligne graphique du label, voir https://folkways.si.edu/magazine-spring-summer-2012-look-listen-cover-art-folkways-records/music/article/smithsonian et https://folkways.si.edu/feature/look-of-the-listen/index.html


Folkways dans les collections de PointCulture et en dépôts à Liège et à l’ULB-Ixelles

Environ 1200 disques Folkways sont conservés dans les collections de PointCulture, 700 en rééditions CD et 500 en vinyles.

Tout l’été, vous pouvez découvrir, écouter – et éventuellement emprunter – une sélection d’une petite trentaine de titres à Liège (Bertolt Brecht, James Joyce, Roscoe Holcomb, Jean Richie, Pete Seeger, ragtime et calypso, musiques du Maroc, d’Ethiopie, d’Ukraine, etc.) et au PointCulture ULB-Ixelles (Pete Seeger, Cisco Houston, Olla Belle Reed, guitares hawaïennes des années 1910, musiques de Trinidad, de Finlande, du Kerala, du Sud-Sinaï, des îles Amami, etc. ).

Tous les autres disques du label (tant CD que LP) peuvent être commandés via Samarcande.

Philippe Delvosalle
Et Étienne Bours / La Médiathèque pour la première partie.

> site Folkways

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